Toutes les traditions ont utilisé ce symbole. C’est la boisson des fêtes et des banquets, où elle se partage à la gloire du Grand Architecte de l’Univers. Elle y est indissociable du pain ; ces deux nourritures primordiales permettent ainsi les rites de renaissance. L’alliance des nourritures solides et liquides célèbre l’union du Ciel et de la Terre, et celle des initiés avec la pensée divine en donnant l’énergie nécessaire pour découvrir le chemin de vie. Ces deux éléments associés à l’Amour ou Feu des agapes et à la Parole qui y circule ou Air, permettent de vivre un instant de création.
Quelle est sa nature ? Le vin est offert au feu à la Saint Jean d’Hiver, avec le pain et le sel. Dans ce triptyque, il correspond à la Sagesse, donc au concept et à l’esprit. C’est une boisson divine, réservée avant tout aux Dieux. Il est le sang divin (cf. le sang du Christ, recueilli dans la coupe du Graal, par exemple), l’énergie du Père qui nourrit le vivant. Dans certains mythes, il est capable de se substituer au sang humain pour calmer la colère divine contre les hommes. Il est moyen de transmission et de partage, d’où l’expression « in vino veritas ».
L’Eau primordiale ne peut pas être ingérée telle quelle. Elle est changée en vin, breuvage de vie, d’immortalité. Le Feu secret, qui est rouge, agit sur l’Eau, faisant ressortir l’essence de la spiritualité de cette boisson. L’initié doit l’absorber pour avoir l’intelligence spirituelle de la Règle et entrer en résonance avec la partie subtile de l’univers.
Ce breuvage est élaboré alchimiquement par les quatre éléments. Les raisins, symboliquement rouges, sont produits par le Feu du soleil et l’Eau puisée dans la terre ; ils subissent la fermentation qui inclut l’élément Air, de couleur bleue ; le vieillissement se fait en cave, au cœur de la terre qui est noire. Le résultat est donc un liquide pourpre. Les quatre éléments se retrouvent dans le nom égyptien du vin, « IREP » qui s’écrit avec la plume, la bouche du Verbe créateur et le carré.
Quel est son effet ? L’ivresse. En Egypte, le même mot « tekh » signifie peson (il a la forme du cœur qui boit en permanence le sang) et donc fil à plomb, et ivresse. Celle-ci est une saturation par imbibition du Feu divin. Seul le vin donne accès à l’ivresse divine, à l’essence de la création et donc à la Connaissance. Elle n’a rien à voir avec l’enivrement physique, mais apaise les dieux en neutralisant leur aspect imprévisible. Elle a toujours eu une grande importance théologique, dans toutes les traditions. Elle peut donc donner accès à l’immortalité. Il faut goûter le vin pour atteindre une vie en éternité. Le fil à plomb montre que cette boisson permet l’élévation vers les choses les plus primordiales. Elle éveille l’âme, fertilise les sens spirituels. Elle soigne le corps et l’âme, en expulsant toute crainte existentielle et tout doute. Clef de l’intuition, elle révèle la lumière qu’elle contient pour aller au-delà des apparences.
L’usage du vin peut être dangereux. Il est même empoisonné pour celui qui n’est pas préparé à l’absorber. Un être accompli, déjà passé par la mort, ne court pas de risque s’il continue à vivre selon la Règle et selon la fonction qui lui est confiée. Ce breuvage de l’amour divin peut alors placer en lui la lumière venant des grappes gorgées de soleil. Il en résulte une profonde joie, véritable ode à la vie, une réjouissance du cœur. La conscience témoigne et rayonne. Les santés tirées pendant le banquet expriment toute la puissance et tout le désir initiatique des frères vers ceux à qui elles sont portées.
Mais celui qui confond symbole et matière tombe dans les excès. La consommation abusive ou solitaire peut détruire la conscience et annihiler la personnalité. Il convient d’en boire avec discernement.