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II.3.c La protection du Frere : detourner le destin ; vivre au-dessus de son theme de naissance

         Protéger le frère est une expression qui peut interpeller dans le cadre d’une démarche initiatique. Soyons clair, le Frère n’est pas protégeable, ni par le Temple ni par la Communauté initiatique. C’est uniquement à lui de le faire, s’il le souhaite et ne se satisfait pas de son état. La Communauté initiatique peut aider provisoirement et éclairer, si le Frère le demande. Elle ne peut ni ne doit se substituer à la volonté du Frère. Il n’en reste pas moins vrai que chacun doit se demander ce qu’il doit protéger en lui, comment le faire et pour quel résultat.


         De quoi s’agit-il sur le plan initiatique ? De quoi peut-on se protéger ? Du monde profane qui peut perturber, gêner voire pervertir le désir sincère de parcourir la voie ? L’ego peut le demander mais il est lui-même un obstacle sur la voie en mettant en avant l’individu. Le plus courant reste celui qui ne maîtrise pas ses pulsions, ne se détache pas de son déterminisme qui l’enferme dans ses propres limites et capacités, puis s’éloigne de l’ouverture à l’universel qui est une des bases de l’Initiation. Au-delà de cela, le Frère peut conserver une perception et une interprétation binaire du monde ; celle-ci est quasiment universelle dans le monde profane, créant des oppositions là où il est possible de rechercher la complémentarité ou une troisième voie. Mais il peut aussi se perdre dans sa démarche, chercher de mauvaises réponses à de mauvaises questions, suivre des faux-semblants, voire parcourir des mondes intermédiaires qui sont bien souvent des impasses.

          Il faut en revenir à la constitution traditionnelle de chaque homme en tant que corps, âme et esprit. Le corps est strictement lié au temps et à la matière et subit un destin lié à ces deux plans ; ce dernier dépend de tout ce qui influe sur l’existence et son déroulement : l’environnement physique (y compris celle des astres), le potentiel génétique qui s’exprime plus ou moins, l’éducation, l’expérience, les influences diverses, la position sociale, les héritages divers, toutes choses dont nous ne sommes nullement responsables ; notre capacité d’action y est très limitée et, chacun, sans en avoir réellement conscience, subit l’existence et tout ce qui lui arrive. Le corps est déterminé sans retour possible. En effet, la racine « sta » du mot destin indique la fixité, l’immobilité ; cela ne peut changer. L’Égypte ancienne peut nous éclairer sur ce destin. C’est « Shaï », un des constituants de chaque individu. « Shaa », signifie commencer, être issu de, et « Sha » signifie décréter, déterminer, prédestiner. Le destin est donc une chose déterminée, liée à l’individu et dont la raison est dans son commencement, donc sa naissance. Le thème de naissance est la signature de chaque être lors de son apparition dans l’univers. L’homme n’est pas libre naturellement, entravé par de nombreux verrous, qu’ils soient intellectuels, sentimentaux ou instinctifs, et qui anesthésient la pensée, stoppent toute recherche et conduisent bien souvent à s’inscrire dans un dogmatisme stérile qui assèche spirituellement. On ne peut que suivre ce qui est tracé. Peut-on réellement connaître ce destin et le doit-on ? Laissons la réponse aux psychologues, philosophes ou astrologues ; simplement, on ne peut le rejeter et autant l’harmoniser autant que faire ce peut avec les choix de vie. Si la naissance est une perte de l’universalité vers un particularisme, l’apprentissage de la voie initiatique fait prendre conscience de ce déterminisme pour s’intéresser aux autres constituants que le corps qui va disparaître, au moins en apparence, et n’est pas protégeable ; ce n’est qu’un véhicule, indispensable donc à entretenir, et pas une finalité.

          L’esprit, de nature incréée, ne risque rien et retournera de toute façon à son origine. Mais nous pouvons en prendre conscience et nous centrer sur lui. C’est l’étincelle divine dont tout être est porteur. Isha Schwaller de Lubicz, dans « La lumière du chemin » précise : « Chacun doit trouver en lui-même sa propre lumière : ce point est l’obstacle auquel se heurtent les chercheurs qui s’obstinent à comprendre au lieu d’éprouver ».

          Il reste l’âme et elle a le choix : être esclave du corps ou s’unir à l’esprit, donc disparaître ou entrer dans l’éternité. N’étant pas matérielle, elle n’est guère déterminée. Si le corps commande, voire nie l’âme, l’être est totalement déterminé. Si l’âme prend les rênes par l’Initiation et se rattache à l’esprit, la parcelle de lumière, la part d’incréé, le destin physique n’a plus d’importance et l’homme peut s’épanouir, s’accomplir. Par l’Initiation, il est tout à fait possible de vivre au-dessus du thème de naissance. Un initié est quelqu’un qui a décidé un jour qu’il ne se satisfaisait pas de son état et désirait élargir son champ de vision et de compréhension. Il dépasse sa signature zodiacale pour s’intégrer en conscience dans la conscience de l’univers. C’est ce qu’affirme Jamblique (Le Mystères d’Égypte) : « L’âme a en propre le principe de la conversion vers l’intelligible, du détachement des êtres soumis au devenir, de l’union de l’être au divin... Mais tout dans la nature n’est pas non plus lié à la fatalité : il est un autre principe de l’âme supérieur à toute nature et à toute connaissance et selon lequel nous pouvons nous unir aux dieux, nous tenir au-dessus de l’ordre cosmique et participer à la vie éternelle et aux activités des dieux supra célestes. Selon ce principe, nous sommes capables de nous libérer nous-mêmes. En effet, quand agissent les meilleurs parties de nous-mêmes et que l’âme s’élève vers les êtres supérieurs à elle, alors elle se sépare entièrement de ce qui la retient auprès du devenir, elle se détache des parties inférieures, à la place de sa vie acquiert une vie nouvelle, et se donne à un autre ordre, en abandonnant complètement le précédent ». Zosime de Panopolis insiste : « Zoroastre affirme que par la connaissance d’en haut et par la magie du langage corporel, tous les maux de la destinée sont détournés, aussi bien individuels que les universels ».

          Cela est évoqué rituellement par le dépôt des métaux à la porte du Temple. Il ne s’agit ni de la montre, des bijoux, des signes extérieurs de richesse ou de situation familiale, ni de ce qui particularise matériellement les êtres comme leur place dans la société humaine. Bien entendu, un Frère doit laisser sa vie privée hors du Temple. Les vrais métaux sont notamment ceux que contient son zodiaque, les planètes qui impriment l’individualité, la nature profonde. Chaque planète s’apparente à un métal (Vénus au cuivre, Mercure au mercure ou vif-argent, Mars au fer, Saturne au plomb, Jupiter à l’étain et les Luminaires à l’or et l’argent). En laissant l’individualisation à la porte du Temple, c’est l’âme, la conscience, qui intègre le Zodiaque communautaire, et, tout en conservant sa particularité zodiacale, l’être peut s’incarner dans toutes les puissances de création.


          Alors, comment protéger l’âme ? Les démarches spirituelles ont chacune leur voie ; pour nous, c’est l’Initiation et cela passe par l’intégration dans une Communauté initiatique afin de s’élever au plus haut.

          L’Initiation, étymologiquement, met dans le commencement par un retour à l’origine, dans un nouveau départ et donc une nouvelle orientation de l’existence. L’univers créé vient de l’océan primordial incréé, portant les semences de tous les possibles. Chaque chose est donc conditionné par ce qui la débute, dans l’incréé. Bien commencer les choses, c’est bien les orienter. A l’ouverture des travaux dans le Temple, la lecture du Prologue de Jean nous remet dans le commencement, donnant la clef de la réinitialisation de la création ; cela concerne notamment les métaux qui retrouvent leur nature originelle ; la dualité créatrice renaît. L’Initiation est là pour nous réinitialiser, nous remettre dans le commencement, dans une nouvelle phase d’existence et donc un nouveau destin se superposant au précédent. L’être est en effet toujours libre de choisir l’indépendance pour revenir à son naturel de naissance physique, ou bien de rester dans la voie initiatique dans une détermination par les actes selon la Règle. C’est cela détourner le destin et se placer au-dessus de son conditionnement de fin d’adolescence. Il est possible de changer de trajectoire, ce qui est un détachement de ce qui arrive ici-bas en liaison avec l’acte de prendre conscience de la conscience universelle. Apulée, dans « L’âne d’Or », dit bien : « Ceux dont l’autorité de notre déesse (Isis, donc la Veuve pour nous) a revendiqué la vie pour son service ne sont plus exposés aux attaques du sort ». Ainsi les êtres peuvent s’éveiller et leur travail qui consiste à servir plus grand que soi, leur permet d’échapper au déterminisme ; en agissant sur les causes, il est possible d’influencer les effets. L’amour fraternel qui naît sans cesse par l’écoute et l’ouverture aux Frères permet de percevoir les causes et d’adopter la posture adaptée à chaque situation pour remplir la fonction essentielle qui consiste à servir le Principe de création. Chaque chose créée a un Nombre qui spécifie et lui permet d’accomplir ce pour quoi elle a été créée ; l’homme est le seul qui peut échapper à ce conditionnement par la Connaissance et la pratique de tous les Nombres.

          Voyager seul comporte non seulement le risque de se perdre mais aussi de ne pas s’en rendre compte. Par analogie, c’est la même situation que pour une chorale ; celui qui chante faux isolé, chante juste dans sa chorale s’il s’y sent intégré. C’est pourquoi l’objectif essentiel de l’Apprenti (dernière question du viatique) est de s’intégrer à sa Communauté initiatique car il sait que s’il est seul, il est entièrement soumis à son déterminisme. Devenir Frère détourne le destin par un changement de priorité qui permet d’entrer dans un nouveau cycle de renaissance permanente. L’être n’est plus une singularité figée et limitée ; il se fond dans une unité au service de l’œuvre communautaire et entre en conscience dans le mouvement de la vie et les mystères de la création. Il ne vit plus pour lui-même mais pour une cause commune où il recherche la Connaissance dans les formes les plus humbles de la vie, et l’ego, toujours présent mais dompté, ne dicte plus l’existence tout en mettant son énergie au service de cette recherche, tel un guerrier. Le don de soi, des potentialités, fait que l’on ne travaille plus pour soi mais pour rendre gloire au Grand Architecte de l’Univers. Néanmoins, chacun a un vécu propre qui doit s’expérimenter en Loge comme dans le quotidien. Quand lêtre a intégré la Communauté initiatique, par un choix mûri et réfléchi de prendre son existence en main, les moyens d’une protection dynamique et non étouffante sont nombreux, que ce soit par la Règle, les rituels ou la pensée formée par les travaux et la fraternité. Par la soumission en toute liberté et connaissance de cause à la Règle, la référence permanente pour ne pas se perdre et rester en conscience sur la voie, l’être est régulé et n’est plus livré à ses envies qui deviennent alors des moteurs à l’intégration. Voyant l’essentiel au-delà des apparences, il se détourne de son ego avec les penchants qui vont avec ; il ne peut plus céder à l’accessoire. Il sert sans être servile prenant conscience de sa juste place dans l’univers. Il est humble sans se laisser flotter au gré des événements. Telle est la magie individuelle qui détourne le destin. Par les rituels, il prend pleinement place dans les fonctions attribuées et participe de l’Homme Universel ; il accomplit les fonctions attribuées et participe activement de la fraternité des puissances, des fonctions créatrices, dans leur transmutation permanente. Par sa pensée devenue ternaire, les portes illimitées de la perception du Verbe sont ouvertes ; il pratique la même langue que ses Frères, celle des symboles, ce qui éveille sa parcelle de Lumière, clef de l’union avec ses Frères qui ont tous donné le même serment, et donc clef de la fraternité. L’initié peut ainsi se sentir « à couvert » en permanence, dans le Temple comme dans le monde dit profane.

          Cette protection de l’âme provoque une élévation de la conscience qui se situe alors au-dessus du thème de naissance. Le destin linéaire du corps est dépassé par une temporalité cyclique vers le ciel des causes éternelles que seul le rituel peut donner. Elle fait entrer dans la fraternité causale qui ne concerne pas le corps mais l’âme. Les Frères sont des pierres de l’édifice en construction qui agit comme une protection pour vivre en pleine conscience les Mystères. C’est bien la chaîne d’union où chacun est le garant de l’autre et qui oriente les regards vers la Lumière du Tableau de Loge. Le même désir d’œuvrer rituellement ensemble élève toute la Loge. Chacun est l’initiateur de l’autre pour ancrer les âmes avec l’Esprit universel, les nourrir spirituellement comme cela se vit au banquet. Si le Frère est vraiment dans les fonctions qui lui sont attribuées, il vit des instants de voie brève qui l’intègrent dans le Zodiaque de la Loge, et dans la voie longue de son travail journalier ; il utilise son zodiaque particulier avec son génie propre. Toute la difficulté du parcours initiatique est dans le vécu de ces deux voies simultanées et de les marier. La pleine conscience de tout cela fait passer des Petits Mystères aux Grands. Cependant, ne pas accepter de vivre la mort de son vivant, c’est accepter de ne pas subir de métamorphose, de ne pas se réinitialiser, de ne pas aller à la Maîtrise. Notre voie longue est celle des petits Mystères, notamment par l’Art du Trait qui modèle le caractère, cette aptitude à percevoir l’abstrait. Le Compagnon fini est celui qui a achevé son destin initial, qui a su le détourner pour passer dans une autre dimension. N’est-ce pas ce que provoque Don Juan quand il tente de violer la Veuve et qu’il tue le Commandeur (d’ailleurs Leporello demande à Don Juan : qui est mort ? Vous ou le vieux. Pourtant, il est présent lors du duel) ? Le destin supérieur proposé par la voie est le retour à la Cause ; il nous est proposé de retrouver le centre de toute chose.


          Quels effets peut-on espérer de cette protection ? Une libération de l’être qui peut participer à l’Homme Universel et un vécu de l’Alchimie.

          En effet, dans la Communauté initiatique, il se libère de ses certitudes par la diversité des apports de chacun et des vécus de chaque Frère ; son âme s’ouvre avec la voie parcourue et se relie de plus en plus à son esprit, vivant en conscience. Il entre dans l’Unité, protégé des scories de son passé de vieil homme et endosse un vêtement de lumière par les fonctions qu’il assume. Il ne subit plus un destin devenu sans importance.

          Vivant en harmonie dans sa Loge et recherchant la Volonté du Principe créateur, il participe à tous les aspects de l’Homme Universel qui se vivent par le kaléidoscope communautaire, composé des fragments de miroir de chaque Frère qui renvoient de multiples lumières tout en restant cohérents. Il intègre les multiples angles de vue car il concilie les contraires ce qui lui permet de trouver en lui les moyens de maîtriser et de développer ses sens immatériels. Il crée ainsi un terreau fertile pour sa Communauté.

          L’Alchimie a commencé dès le début de la voie. Le néophyte, dans la crypte, porte son nom et sa date de naissance sur un zodiaque qui représente ses métaux. C’est une sorte de carte d’identité céleste de naissance qui le singularise tout en le reliant à l’univers. Ce zodiaque est porté au Frère Trésorier. Le néophyte est ainsi dépouillé de son particularisme. A la fin du rituel d’initiation, ce zodiaque est brûlé : une purification du Karma dirait-on dans l’Hindouisme, qui arrache les entraves de la chaîne des causes et des effets de l’existence précédente. Puis les cendres sont restituées au nouvel Apprenti. Le rituel a réinitialisé l’être par la purification des quatre éléments et il va pouvoir, tel le Phénix, renaître de ses cendres, ce qui ravive son étincelle divine, son esprit ; il peut entamer son chemin vers la Lumière. En spagyrie, on brûle une plante, puis les cendres circulent, correspondant au sel, au corps, et on en tire un esprit ; par analogie, un esprit peut sortir des cendres du zodiaque ; c’est une extraction par le feu du volatil qui est dans l’être, de sa matérialité. N’est-ce pas ce sel qui aura une augmentation de salaire ?

          Les métaux d’un être, mutables par nature, illuminent ou non certaines parties du zodiaque, certains signes. Or ceux-ci ont une correspondance minérale, fixe et ils sont la formulation des quatre éléments. Chaque élément est en correspondance avec trois signes (le Feu par le Bélier, le Lion et le Sagittaire ; la Terre par le Taureau, la Vierge et le Capricorne ; l’Air par les Gémeaux, la Balance et le Verseau ; l’Eau par le Cancer, le Scorpion et les Poissons) ; l’ensemble des signes sont la formulation des quatre éléments.

          Les métaux déposés à la porte du Temple à l’ouverture des travaux, sont dépersonnalisés pour entrer dans le Temple ; ils vont de la minière à l’athanor, auprès du Trésorier, le gardien de l’athanor. Différentes lumières sont ainsi mises ensemble puis fondues et purifiées pour devenir Or et Argent, selon la nature des Luminaires, et former de l’électrum sous la conduite du Vénérable Maître, l’alchimiste qui régule les feux pendant la tenue.


          La Communauté initiatique connaît les énergies de l’univers qui nous inondent en permanence ainsi que les métaux qui éclairent chaque Frère ; il est alors possible, communautairement, de nous dépasser par la Règle et par l’Amour. Puissions-nous nous protéger en déposant inlassablement des métaux à la porte du Temple pour entrer alchimiquement dans l’Unité.

 


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