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III.1.b L action initiatique se repercute en haut comme en bas

         La magie initiatique ne fonctionne pleinement que dans le Temple où l’action trouve toute son efficacité spirituelle. Selon Henri Bergson, il n’est pas possible de caractériser l’action comme la production d’une liberté typiquement humaine car elle est une affaire intérieure dont l’extériorisation est influencée par le temps. Cela laisse supposer qu’elle n’est pas vraiment du domaine purement humain. Demandons-nous alors ce qu’est une action initiatique, comment elle fonctionne et que peut-on en attendre.


         Toute action naît de la volonté ; dans notre démarche, elle vient de la volonté créatrice. En Égypte ancienne, Râ, le démiurge, s’écrit avec le r, la bouche et le a, l’avant bras ; il est donc la bouche en action, le Verbe qui se prononce et devient le réel. L’action du Grand Architecte de l’Univers est donc claire : il crée.

         Une Communauté initiatique agit à son image pour prolonger son acte. Sa vocation est d’agir vers Lui, vers le haut pour se connecter au monde de l’Esprit, vers l’incréé, vers la Cause des causes pour œuvrer, à partir de la Règle, selon Sa volonté en faisant vivre toutes les fonctions de création (les offices) nécessaires à la vie. C’est tout particulièrement le cas avec le rituel d’Initiation qui permet de créer un nouveau Frère en réponse à l’appel de sa conscience. L’entrée dans la Loge de celui-ci résulte du mouvement des deux parties. Les épreuves du rituel composent l’action qui mène le postulant vers l’Orient, donc vers le haut. Une tenue est un ensemble d’actions initiatiques qui ont un effet sur le monde des causes en interpellant les fonctions causales ; il y a interaction avec le Verbe et l’énergie spirituelle. On est bien dans la magie qui utilise une énergie qui vient du divin et dont la Loge dispose, donnant le pouvoir d’agir, et ce dès le grade de Compagnon. L’Apprenti sert et fait vivre ainsi la Communauté initiatique ; le Compagnon formule et le Maître meurt ; « Le geste d’un maître opère quel que soit l’homme qui est derrière ; ma fonction est parfaite, pas mon humanité » (J.L. Leguay. Le maître de lumière). Ainsi la communauté initiatique crée. Il y a élévation du monde d’en bas vers le monde d’en haut tout en prenant la source dans ce haut caché mais présent en bas. Il s’agit de révéler le divin ici-bas et d’en prendre conscience pour que le haut soit accessible aux hommes en entrant en résonance avec les forces universelles.

         Cependant, cette action ne peut être que communautaire ; seul, nous apporterons toujours des perceptions incomplètes. Certes, l’être initiable découvre au fond de lui-même un appel, un mouvement qui va l’amener à frapper à la porte du Temple pour commencer une nouvelle vie (« initiare », commencer). Son action est le début d’un chemin sans fin mais « la route de mille Li commence par un pas » (proverbe chinois). Cette mise en marche est définie dans le viatique de l’Apprenti : « Trois pas dans l’angle d’un carré long. Cette marche signifie la mise en action d’un désir orienté vers la Lumière. Les pas symbolisent la conscience vécue du plan de Création ». Dès lors, le Frère doit être dans le Temple à sa juste place selon son grade et son Nombre, ce qui le met en marche vers la Lumière avec ses Frères. Il apportera à chaque tenue son travail qui sera offert au tronc des offrandes après que l’attouchement du Trône de la Veuve ait vérifié la régularité, l’implication du frère. C’est cela qui alimente la perception synthétique de la Communauté initiatique et permet son œuvre de formulation qui sera elle-même rendue au Principe de création lors du rituel du Feu de la Saint Jean d’Été.


         Comment cela fonctionne-t-il ? Nous n’avons pas le choix : « Dans cette vie présente, il n’est pas de contemplation continue, car les nécessités de l’action et des devoirs utiles sont d’une urgence contraignante à tout moment » (Saint Bernard. Sermon 58). L’action que nous pouvons mener passe par le rituel, le jeu des Nombres et le travail d’une matière par des outils adaptés.

         Nos actions sont impossibles sans rituel. Il crée un mouvement vital développant une circulation énergétique entre l’espace de création du temple ou Orient, où siège le Vénérable Maître et le Passé-Maître, l’espace de manifestation recouvert du pavé mosaïque, là où se trouvent les Frères, et l’espace de transmutation, derrière l’Occident, où se trouve la salle du banquet. Dès lors, à partir de ces trois espaces, les paroles sacrées permettent à la fois de faire venir le divin et de lui faire offrande de perceptions, de conscience, à travers des formulations issues du travail initiatique. Toute tenue est alors une action initiatique qui crée à chaque fois un monde qui augmente la conscience à la fois de l’univers, celle de la loge et celle des frères. L’harmonie incarnée ici-bas peut régner en résonance avec le haut.

         Curieusement, l’action passe aussi par les Nombres. Le Deux est le combat de la Lumière qui tente de jaillir de la Ténèbre ; déjà là, nous pouvons agir par le rituel qui fait se lever la Lumière de l’Orient. Le Trois enseigne la direction que le Vénérable Maître doit donner ; c’est l’action essentielle qui consiste à réunir les Trois Grandes Lumières ; quand elles sont séparées, rien n’est perceptible ; assemblées, cela « contraint » le Grand Architecte à être présent dans notre conscience et le divin vient ici-bas ; sans rituel, le divin ne peut être présent. Le Quatre stabilise la pensée et le Cinq lui permet de rayonner. Le Six unit le haut et le bas comme l’indique la Table d’Émeraude : « Il est vrai, sans mensonge, certain, et très véritable : Ce qui est en bas, est comme ce qui est en haut ; et ce qui est en haut est comme ce qui est en bas, pour faire les miracles d’une seule chose ».

          En effet, le sceau de Salomon ou étoile à six branches est construit au sein du cercle, symbole du mouvement, à partir du rayon. Il forme deux triangles à pointe inversée. Il y a introduction d’une nature dans un champ différent, de l’intemporel dans le temporel, de l’humain dans le non-humain. Six est ainsi un médiateur entre le Principe et la manifestation, entre le divin et l’humain. Il symbolise le passage de l’idée à la forme, le mouvement permanent entre le haut et le bas, un peu comme le maillet qui va de bas en haut et inversement. Ce basculement est alchimique, contrairement à la fonction de croisement qui ne change pas la nature. Mais Six est aussi le Nombre de la nature et celui de la source de vie sur terre ; l’eau cristallise selon ce Nombre. Six est donc à la fois le principe d’inversion qui unit le haut et le bas, et la loi d’équilibre qui oppose une réaction à toute action, tout en reliant celle-ci au tout universel. Cette étoile ne peut se tracer d’un seul trait, mais par deux ; elle est bien l’antagonisme de deux actions. C’est donc un Nombre secret qui équilibre et sépare, qui ouvre et qui ferme. Il est ainsi celui du destin, auquel on peut échapper par la connaissance des autres Nombres.

          Enfin, autre mode d’action initiatique, apporter à la conscience universelle de la matière en la travaillant avec des outils adaptés. Si l’on ne peut en mesurer les conséquences, la Règle nous en fait un devoir. En fait, notre travail est de manier des outils pour travailler une matière au moment juste et en dégager une forme. Cette matière de l’œuvre est unique mais elle a trois aspects : Verbe, énergie spirituelle et Frère. Le devoir par rapport au Verbe est la formulation par les rituels, en liant les symboles et en exprimant ce que l’on perçoit dans l’invisible. Le devoir par rapport à l’énergie est la chaîne d’union qui recharge tout un chacun et crée de la vie manifestée qui est fondamentalement mouvement. Le devoir par rapport au Frère est que chacun est un outil de perception pour les autres.


        Quel peut être le résultat de laction ? Une élévation de la conscience de la Communauté initiatique qui peut rayonner à tous niveaux.

         Toute action initiatique a des répercussions sur la conscience, l’âme. Une lame du tarot illustre bien cette action initiatique ; c’est la lame IX, la tempérance. Cette tempérance est une des quatre vertus morales, dites vertus cardinales ; elle discipline les désirs et les passions humaines. Elle représente l’Archange Michel mélangeant le contenu de deux coupes qu’il tient chacune dans une main. L’Eau semble remonter d’une coupe à l’autre, dans un mouvement impossible pour les lois de la nature. L’Ange a un pied dans l’Eau et l’autre sur la Terre. L’élément Feu est représenté par la couronne et ses ailes incandescentes ; l’élément Air est présent tout autour de lui. Malgré la tension du liquide entre les deux coupes, il se dégage ici un sentiment d’équilibre et d’apaisement. Par son action, la tempérance parvient à concilier des forces a priori irréconciliables : l’Eau et le Feu, le corps et l’Esprit. La tempérance est l’âme et c’est le pouvoir de l’âme de faire circuler harmonieusement l’énergie vitale entre le corps et l’esprit, et donc plus largement entre la terre et le ciel, le bas et le haut, l’infiniment petit et l’infiniment grand, le microcosme et le macrocosme et donc dans l’univers dans toutes ses dimensions. Par l’âme, haut et bas peuvent être inséparables et en communication permanente, et les puissances de création peuvent agir à tous niveaux. Par son action, l’âme peut être le sel alchimique qui unit le soufre et le mercure ; ce mariage aboutit à la Pierre des transmutations.

          La pratique de la volonté créatrice s’applique à l’âme ; elle est la nourriture qui permet

d’unir le haut et le bas sans les confondre. L’action initiatique est donc cette nourriture qui

permet l’union du terrestre et du céleste. Le céleste est le ciel des causes, de l’origine, qui

contient le tout, alors que le terrestre est ce qui porte le tout et incarne les causes dans la

matière. Entre les deux se trouve la production de cette nourriture. La terre est comme un

premier cercle à l’intérieur duquel se trouve toutes les puissances. Le ciel est comme un

troisième cercle au-dessus duquel se trouve l’Homme Universel. Entre les deux se trouve un

monde intermédiaire, le cosmos de la Loge, lieu de manifestation de toutes choses et de nos

actions initiatiques. Une bonne représentation de ces trois mondes est le bijou de notre Loge

représenté ci-dessus.

          Cela s’illustre parfaitement dans la marche de l’Apprenti qui trace le plan du ciel sur

terre, le carré long argenté (« Trois pas dans l’angle d’un carré long ») d’où tout peut se

construire géométriquement. L’exécution de cette marche aligne avec le haut et le manifeste,

voire l’intègre en celui qui la pratique. C’est aussi dans cette dynamique que le chef d’œuvre

du Compagnon amène une nouvelle pierre au Temple capable de nourrir l’œuvre

communautaire ; il est un don fait au ciel des causes, une offrande qui tire son inspiration du

haut et se concrétise. La pensée est rendue féconde et se construit par l’Art du Trait. Il est

encore possible d’exprimer autrement l’action en disant que le haut est en fait le centre de

l’univers (« Dieu est une sphère dont le centre est partout et la circonférence nulle part »,

selon Hermès Trismégiste) et que vivre au centre par le rituel concilie les contraires et touche

tous les plans de la conscience.

         Les lois d’harmonie se déploient à l’identique dans toutes les dimensions, contribuant

à l’union du haut et du bas qui ne sont que les deux aspects d’une même réalité. Toute

action est alors à la fois immanence et transcendance, travail dans l’invisible par l’espace

sacré du Temple et témoignage dans le monde visible, perception de l’action du Grand

Architecte comme de la présence universelle du Principe de création et élévation de la

conscience qui enrichit le tout. C’est tout le sens du mot « répercuter » qui signifie renvoyer

un son, une onde, transmettre mais aussi atteindre quelque chose par effet de rebond ; c’est

exactement ce qui se passe entre le haut et le bas.

         Tout ceci concerne l’âme de la Communauté initiatique, tout en se répercutant dans celle des Frères et dans celle de l’Homme universel. Les Frères sont la matière meuble pouvant imprimer les effets de l’action communautaire. Le nom de frère se dit « sn » en langue hiéroglyphique. Mais ce mot a plusieurs sens selon les déterminatifs :

* Ouvrir s’écrit avec le verrou et l’énergie, la pièce d’eau et la vantail de porte. La fonction du Frère est donc de libérer l’énergie afin qu’elle puisse circuler entre le haut et le bas. Il doit être à même d’ouvrir la Loge comme le dit le rituel : « Le Vénérable Maître est à l’Orient pour faire naître ce qui est et ce qui nest pas encore, ouvrir la Loge, la diriger dans sa création et léclairer de ses lumières ». Ceci est possible parce que cet acte est accompli selon l’amour de la Règle dans un lieu d’amour. Le Frère libère ainsi l’énergie de l’au-delà, cette énergie contenue, bloquée par les Initiés passés à l’Orient éternel dans le Temple couvert. Ensuite vient l’ouverture des travaux où le Vénérable Maître convie les Frère Premier et Second Surveillant à se joindre à lui pour ouvrir les travaux par les Mystères accoutumés.

* Révéler, dévoiler. Il s’écrit ici avec le verrou, l’énergie, le rouleau de papyrus scellé et l’île ou

banc de sable. Le Frère révèle par le rite le secret qui s’opère entre le haut et le bas. Le rite

lie les mondes entre eux. Il rend les symboles perceptibles et le secret par nature formulable.

Les ouvertures des différents portes effectuées lors du rituel dans le temple couvert et la

circulation d’énergie qui a été possible permettent, au moment du banquet, la révélation, la

découverte des chemins secrets de la pierre cubique pour les Compagnons, pour les

Apprentis, la reconnaissance de l’énergie dont ils ont besoin, et pour tous la découverte du

chemin de vie par l’entendement de ce que proclame le devoir.

* Sentir, respirer. Il s’écrit ici avec la serviette pliée, le harpon, l’énergie et le nez. Ce dernier

permet bien sûr de capter le subtil, le parfum mais il permet surtout de faire vivre l’être. Sans

air, pas de vie. Le Frère permet donc la transmission de la vie, de cet air entre le ciel et la

terre, cet entre-deux où se trouvent toutes les formes de création.

         Ainsi s’accroît la conscience à tous niveaux, au-delà des capacités de chaque Frère et peut-être même de la Loge. C’est tout le sens du don sans réserve du travail de chacun au travail communautaire à la seule gloire du Grand Architecte de l’Univers. Il y a cohérence et complétude dans l’action initiatique qui tend à rejoindre l’universel et à faire vivre l’Homme universel selon la volonté principielle.

         Alors, comme le dit Teilhard de Chardin : « Chaque union nouvelle réalisée augmente la quantité absolue d’être existant dans l’univers ». Une vraie action initiatique a une portée universelle et cosmique. Elle achève la création du Grand Architecte de l’Univers. Devenir étoile, c’est rayonner par nos actions et « poursuivre au dehors l’Œuvre commencée dans le Temple ». Le travail du Frère, s’il est porteur de Lumière, ne s’arrête pas aux portes du Temple mais est générateur d’effets dans tout l’univers. Une action lumineuse est toujours utile et efficace.

         En hiéroglyphes égyptiens, « Sp » signifie action, moment favorable, hasard, réussite, laisser une trace, se produire mais aussi être malade. Notre trace actuelle consiste en des rapports, voire des livres et le site internet qui répandent notre pensée ici-bas. Il résulte de ces actions qui dépendent de nous, un résultat qui ne dépend pas de nous et les fruits nous importent peu. C’est en cela que, dans le cas contraire, une action peut rendre malade. C’est le « fais ce que doit... ». Peu importe le nombre de visites de notre site ou le nombre de livres vendus. « En toutes choses, il faut faire ce qui dépend de toi, et du reste être ferme et tranquille » (Épictète). L’âme doit être égale dans le succès et l’insuccès puisque l’action est toujours à la seule gloire du Grand Architecte et non de nos envies.


         Puissions-nous toujours agir rituellement dans le Temple pour que la conscience séveille sans cesse et serve l’Esprit.


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