Avec les trois autres éléments constitutifs de l’univers, le Feu, l’Air et l’Eau, elle correspond aux forces normatives qui ont permis la manifestation, visible ou invisible. Dans la cérémonie d’initiation, qui est la création d’un frère par ces quatre éléments, tout commence par l’épreuve de la terre, dans le cabinet de réflexion ou crypte.
On peut envisager la terre sous trois aspects : celle qui sert à construire les temples, celle qui se creuse et qui est notre mère, et par son symbole qu’est le cube.
Le premier aspect, la terre de feu, rouge, masculine, est un support de création. Issue du désert, elle constitue la matière des pierres des temples. Sous cet aspect, elle est un vêtement qui protège la lumière en l’enveloppant. Protectrice, elle contient le feu et peut multiplier les actions de toutes choses. Elle permet de rendre supportable un véritable enseignement initiatique pour les yeux qui ne voient pas encore. Un temple sert ainsi, notamment, à transmettre un enseignement. Cette terre est à la fois ce qui porte le feu sans être brûlée, et le combustible, l’énergie potentielle qui autorise tout mouvement.
Dans la crypte, cette terre de construction est évoquée par les éléments suivants proposés à la méditation du néophyte : le texte du Prologue de Jean qui incite à accueillir le Verbe et qui montre comment la lumière créatrice se diffuse ; le sablier et la Règle qui indiquent qu’on ne bâtit pas n’importe comment ; la vigilance et la persévérance qui sont nécessaires pour prolonger la création quelles que soient les difficultés.
Le deuxième aspect est la terre-mère, source de fécondité. On creuse en elle les fondations du temple, jusqu’aux eaux primordiales (symbolisme du puits). C’est donc par elle que l’on peut se relier aux origines. En effet, les étoiles y déversent toute leur puissance et produisent là l’or le plus pur.
Cette terre incarne ce qui est nourricier, réceptif et bienveillant. On y trouve la paix. Elle est féminine, en relation étroite avec la Veuve. Cette terre matricielle, mère, est noire (comme la Veuve ou la Vierge). Elle est le principe de la matrice fécondée par le feu divin afin de gester le monde. Elle est également le principe de nutrition sans lequel la vie ne pourrait croître et se multiplier.
Dans la cérémonie d’initiation, en mettant l’impétrant dans la crypte, on le place comme une graine dans le sol. Il y pourrit pour donner naissance à une nouvelle plante (néo-phyte). Il est ainsi clair que la terre ne peut être l’homme ; c’est l’homme qui est mis en terre. Telle est la visite de l’intérieur de la terre du mot V.I.T.R.I.O.L. Cela invite à rechercher les lois causales et les fonctions créatrices, et à les trouver en soi et autour de soi. Cette terre fournit la materia prima qui génère, à partir du germe, toutes les formes de la vie ; elle est l’aboutissement de la manifestation. Elle est la forme, issue de l’idée, le concept réalisé. Là démarre le processus alchimique, comme l’indique la présence du sel, du soufre et du mercure.
Dans l’épreuve de la terre, l’être s’indifférencie pour devenir réceptif à l’ensemble des possibles proposés par la voie initiatique. Il réorganise sa nature interne, ses potentialités qui constituent sa signature de naissance, comme le souligne la présence d’un zodiaque. Il se prépare à un éveil qui se réalisera par les trois autres éléments.
Le troisième aspect se formule par le symbole de la terre, le cube, un des cinq corps platoniciens.
Quatre est le Nombre de la terre, avec ses quatre Orients et il nous renvoie au carré et au cube. Nous sommes bien dans le domaine de la manifestation, issue de l’incréé, de l’Orient.
Le cube est aussi bien symbole de la cité terrestre, matérielle, sur laquelle l’homme est incarné, que de la terre céleste ou cité céleste qui se révèle à ceux qui naissent en esprit. Nous pouvons la vivre ici-bas par tous les instants de création que l’on vit dans le temple. Celui-ci est la terre céleste. Tel est l’axe terre-ciel qui apparaît à l’homme en recherche spirituelle, source de toute immanence et de toute transcendance. Rien, jamais, ne doit séparer ces deux pôles.
Cette terre, que nous aimons et qui nous aime, peut sans doute être assimilée à la force gravitationnelle, l’une des quatre forces fondamentales de l’univers pour la physique moderne.