Clef des Grands Mystères
Complément indispensable de toute tenue dans le Temple couvert, il parachève l’œuvre communautaire par le partage des nourritures. Une tenue peut d’ailleurs se réduire à lui. La salle du banquet, à l’Occident du Temple, en est l’espace de transmutation.
L’art de se tenir à table correspond depuis toujours à l’art de sagesse, à l’art du Verbe. L’initiation ne peut se passer de cet aspect opératif et magique qui associe la partage spirituel à l’échange matériel.
Tout travail de table commence par un rituel du grade et se termine par une chaîne d’union. Il ne peut être anarchique. Il doit être ordonné selon la Règle. La table est symboliquement toujours servie. En prenant place, les frères posent les mains, doigts en équerre. Ils font ainsi une accolade à cette table et reconnaissent la présence des Initiés Passés à l’Orient Eternel, perpétuellement présents.
La circulation des énergies
Tout l’être est sollicité au banquet qui mobilise les cinq sens. La parole qui circule nourrit les frères bien plus que tout autre travail. Le rire en est indissociable, rappelant que Dieu fait apparaître la lumière et crée le monde en éclatant de rire. Comme dans le Temple, chacun s’adresse au Tableau de Loge, à l’invite du Vénérable Maître. La nappe, d’un blanc immaculé, est le Tableau du banquet. Des questions de table sont abordées ainsi que des compléments au sujet de la tenue, les Apprentis pouvant s’exprimer.
Là sont communiqués concrètement tous les mystères. C’est un outil de perception très efficace car tout y est révélé. Il permet de sacraliser un moment essentiel que nous devons préserver car il donne accès dans l’instant à la Cause. L’énergie se rassemble dans ce moment de plénitude fraternelle. On touche la vie en esprit et toutes les formes de vie y sont présentes. Toutes les forces sont rechargées et stabilisées dans le banquet. La vitalité de la communauté s’épuise quand elle est dispersée; là elle se recharge et chacun reprend la puissance nécessaire à l’accomplissement du quotidien. Les liens entre les frères se renforcent.
L’amour fraternel
Les frères ne peuvent se réunir sans banquet car la nourriture fondamentale qui y est consommée est le Verbe, cette énergie spirituelle essentielle. Il a été prononcé dans le Temple couvert et il doit être assimilé. A la table, il se fait chair très concrètement. Rien d’innocent n’y est proposé. La plus grande vigilance est nécessaire. Les nourritures du corps s’associent avec celles de l’Esprit.
Le vin est l’essence de la création. Il est rituellement partagé et bu à la gloire du Grand Architecte de l’Univers. Il est la boisson d’immortalité qui va éveiller l’âme des frères et fertiliser tous leurs sens. Ainsi s’obtient l’ivresse divine. Le vin est la vigilance de la table.
Par la circulation du pain, toute possibilité de transmutation est offerte, à chaque fois, inlassablement. Il se crée une communion qui rassemble tous les frères, du dernier apprenti entré aux Initiés Passés à l’Orient Eternel. Là est la persévérance de la table.
Le pain, qui est une pierre brute, est la substance de la création. L’absorber revient à manger une création du Grand Architecte, à absorber son Esprit et à poursuivre son Oeuvre. Le banquet consiste donc à manger la pierre, celle que l’on taille en communauté et qui naît de la table. Le rôle des maîtres est notamment d’indiquer aux plus jeunes la pierre qu’il faut savoir absorber.
Autour de la table se révèle l’aspect opératif de la communion fraternelle. Le partage qui s’accomplit sur tous les plans est un acte d’amour, de don qui aboutit à une plénitude unissant l’existence terrestre à la vie céleste.