Aussi doué soit-il, l’homme ne peut appréhender l’univers dans sa totalité et le vivre avec le seul recours à des sens matériels.
Certes, ces moyens d’approche du monde extérieur permettent à tout homme de reconnaître les êtres et les choses qui constituent son environnement, tout en prenant conscience de sa propre réalité. Toutefois, ils peuvent être sujets à des aberrations. De plus ils sont relatifs. En effet, ils transmettent leurs différentes perceptions au cerveau, dont l’activité est de nature impalpable puisqu’il s’agit de la conscience. Les informations sont différemment interprétées selon les individus. On ne peut donc leur accorder une valeur objective.
L’initié ne doit pas être esclave de ses sens. Il les domine pour qu’ils lui servent à cerner la réalité dans sa plus grande authenticité.
Pour cela, l’initiation les ouvre à ce qui n’est ni périssable, ni transitoire. Dans le corps comme dans l’esprit, les cinq sens correspondent à l’harmonie secrète de l’univers. Les organes de perception sensorielle sont les supports de perceptions immatérielles pour éclairer l’être et guider ses pas.
Lorsqu’il est proposé au Compagnon d’étudier les cinq sens, il n’est pas question de s’arrêter au côté extérieur, mais d’éveiller leur aspect spirituel pour se rapprocher des Grands Mystères. Il sait que ce sont les portes d’entrée du Verbe qui a ainsi cinq modes différents d’expression. Chacun d’entre eux peut être perçu comme l’aboutissement des quatre autres. Prenons un exemple.
Par l’odorat, l’initié respire le parfum de la vie et reconnaît l’énergie de l’élément Air, symbole du monde subtil et invisible où se propage le souffle divin. Il repère ainsi la substance divine, le sacré, et oriente sa quête (ODORAT).
Il peut alors y goûter, et déterminer la saveur juste de toute chose en discernant l’énergie des nourritures spirituelles. Par là, il apprend à reconnaître l’harmonie qui réside en tout concept et qui ne demande qu’à être exaltée (GOÛT).
Le Compagnon se met à comprendre le langage des oiseaux, donc il entend. Dans l’oreille se trouvent les organes de l’équilibre. L’entendement est ainsi la perception équilibrée de la Parole et du Verbe (OUÏE).
A ce stade, le Compagnon est apte à manipuler la matière. Le toucher lui permet de reconnaître la « forme » qui a pris corps suivant le plan de « l’idée ». Il poursuit la création dans le monde manifesté (TOUCHER).
A ce moment seulement l’être prend conscience de la lumière céleste (VUE). Il voit la face de Dieu et il participe à la création. Telle est la signification de l’expression « Cinq l’éclairent ».
Le grade de compagnon permet cet éveil, par la pratique de la géométrie sacrée et de l’art du trait. Par le vécu de la magie, il développe un sixième sens : l’intuition.
Ce sixième sens fait aborder la vie sous un tout autre angle, mettant en communion le plus profond de l’être avec le cœur des choses. Cette intuition synthétise à elle seule tous les sens ; elle part du cœur et s’exprime par le cœur.
Elle donne accès au livre secret de la création. Elle est liée à l’intelligence du cœur qui coordonne les cinq sens. L’initiation se vit par eux et cela donne un sens à l’existence.
Ainsi l’être marche-t-il en conscience vers la Lumière.