« Visita Interiora Terrae Rectificandoque Invenies Occultum Lapidem »
« Visite l’intérieur de la Terre et, en rectifiant, tu trouveras la pierre cachée ».
Cette formule énigmatique est d’essence alchimique. Elle interpelle le futur initié dès son entrée dans le Cabinet de Réflexion. C’est dire son importance dans le processus initiatique.
Que signifie-t-elle sous cette formulation curieuse ?
Elle peut se comprendre à plusieurs niveaux.
Sous l’angle de l’Apprenti, elle est à rapprocher de la devise de Socrate gravée au fronton du Temple d’Apollon à Delphes : « Gnôthi Seauton » (Connais-toi toi-même ... et tu connaîtras le monde).
Autrement dit, la connaissance de la réalité divine est préhensible par l’étude de l’essence de l’Etre. La Tradition le confirme : le Christ n’est-il pas « Dieu fait Homme » ? L’ancienne Egypte ne considère-t-elle pas que l’Homme EST l’univers ? L’Inde n’incite-t-elle pas l’homme à réveiller le Bouddha qui est en lui ?
L’Alchimie, art suprême de l’initié, a repris cette réalité éternelle au travers de cette formule.
Hermes Trismégiste lui-même nous indique :
« Ce qui en toi voit et entend est le Verbe... Par quoi celui qui réfléchit sur lui-même marche-t-il vers Dieu ? Parce que c’est de vie et de lumière qu’est constitué le père de toutes choses... Si donc tu sais que tu es sorti de la vie et de la lumière et que tu en es formé, tu marcheras vers la vie ».
Un écueil d’importance se dresse devant l’homme moderne : celui de considérer que l’étude de la seule matière va lui permettre de découvrir le secret de la vie. L’initié ne doit pas tomber dans ce piège tentateur, mais redonner à la métaphysique, au sens du sacré, à la conception d’un ordre supérieur (le grec « kosmos » signifiant dans son sens originel : « ordre »), la place que le matérialisme leur a enlevée par un aveuglement conceptuel hors du commun.
L’homme est bien à l’image de son Créateur, si l’on s’en réfère à la tradition et si l’on écoute la conscience de son cœur. On ne peut pas aborder la formule V.I.T.R.I.O.L. par le mental. Si l’intellect peut aider à la compréhension de certains aspects, il doit être maintenu à sa place de simple outil. Laissons s’épanouir la conscience vitale, celle qui échappe à tout rationalisme, celle qui permet de saisir, par entendement, la réalité dans sa totalité.
La visite de « l’intérieur de la Terre » est la plongée irrationnelle dans les profondeurs de l’essence de l’être. Elle va permettre de découvrir toutes les fonctions vitales qui l’animent et « en remontant ou rectifiant », comprendre l’identité parfaite entre ces fonctions internes et les fonctions créatrices qui régissent l’univers (elles sont de même nature).
Cela démontrera, a posteriori, la nature divine de l’homme et donc l’existence du Principe Créateur.
Il s’agit donc de trouver la pierre qui est en soi, c’est-à-dire sa véritable nature, ce qu’il faut travailler en soi (l’athanor) pour s’éveiller, s’élever et se transmuter.
C’est l’alchimie du moi pour l’amener au Soi, ascèse que l’homme ne peut pas réaliser seul sous peine d’aberrations. Il lui faut l’appui d’une communauté et d’une Règle de vie vécue par cette dernière. Seule cette Règle permet la rectification.
Mal conduire son feu, suivre une mauvaise voie conduit souvent l’alchimiste à « se faire sauter » avec son athanor, ce qui, sur le plan pratique consiste en une détérioration quasi complète de la conscience et une destruction du psychisme.
Sous l’angle du Compagnon, à partir du pilier « Force », la terre dont il s’agit est la « Pierre Cubique ». Le Compagnon voyage dans la Pierre pour découvrir en son cœur le tétraèdre, le Feu des origines, véritable cœur de pierre translucide.
Sous l’angle de la Maîtrise, à partir du pilier « Sagesse », l’alchimiste va dans la terre-mère, la crypte, lieu de toute origine, où il découvre la « Pierre Fondamentale du Temple ».