Saint Bernard, dans le sermon 63 sur le Cantique des Cantiques nous éclaire très précisément sur les conséquences de l’absence de vigilance :
« Il se produit une sorte de paralysie spirituelle : l’âme perd sa vigueur, croit n’avoir plus de forces vives, répugne d’avantage à l’austérité, cède à la crainte de la pauvreté ; le cœur se contracte, la grâce se retire, on traîne la vie à longueur de journées, la raison s’assoupit, l’animation intérieure se ralentit, la ferveur première retombe, on succombe aux tiédeurs de l’ennui, l’amour fraternel se refroidit, les caresses du plaisir redeviennent sensibles, une trompeuse assurance rouvre la porte aux vieilles habitudes ».
Etre vigilant consiste donc à rejeter la torpeur et la langueur spirituelle.
Dès le début de sa démarche initiatique, l’impétrant est confronté à ce mot, ou plus exactement à une première ternarité constituée de deux idées, Vigilance et Persévérance, affichées au mur du cabinet de réflexion, et surplombant un coq.
La formule V.I.T.R.I.O.L. s’étale en grand au-dessus de ce ternaire, indiquant par-là le caractère alchimique du processus initiatique. Le cabinet de réflexion est le lieu de purification par l’élément « terre », et en tant que tel, ne peut être que de conception hermétique.
Le coq est le symbole central de cet ensemble. C’est lui qui, par son chant, fait se lever le soleil chaque matin, rappelant le symbolisme égyptien de la barque solaire réapparaissant quotidiennement pour accomplir le cycle éternel de l’alternance jour/nuit ou lumière/ténèbres. Le coq surveille la moindre apparition de la lumière qui jaillit des ténèbres.
Esotériquement, il en est de même du symbole de la résurrection du profane qui va passer des ténèbres à la lumière, et de la transmutation que devra accomplir le récipiendaire au cours de son parcours initiatique. Cela passe par l’alternance de nombreuses morts et résurrections, (les morts du « vieil homme ») qui l’amèneront à la maîtrise et à la vie dans les Grands Mystères.
La vigilance se réalise à plusieurs niveaux. Le Passé Maître, toujours éveillé dans le temple, l’incarne dans son principe. L’Hospitalier l’incarne entre les frères afin de développer le feu de la fraternité. Le frère, enfin, doit toujours être vigilant au Verbe qui s’exprime dans la communauté, car toute parole de vie est semblable au feu. L’initié est un guerrier acharné et vigilant contre lui-même. L’ego est son seul vrai adversaire. Il vit en état d’éveil permanent, selon ce que prône Don Juan, le sorcier Yaki de Carlos Castaneda.
L’initié est perpétuellement attentif à ce que propose la voie : mythe, rite, rituels, symboles..., au travers de la communauté, ainsi qu’à tous les écueils, impasses, déviations et dangers dont la vie est remplie.