Ce mot signifie « qui n’a ni commencement ni fin ». Il ne peut donc s’appliquer qu’à ce qui est en dehors du temps. En tant qu’hommes, nous sommes dans le temps, tenus par lui, depuis la naissance, pendant l’existence et jusqu’à la mort. La notion d’éternité échappe à notre compréhension lorsque nous essayons de la mesurer à notre aune. Pourtant, l’homme doué d’une raison consciente ne rejette pas ce concept. Celui-ci figure dans toutes les traditions : c’est le domaine du Un, ou Divin, ou Etre Suprême, ou Dieu ; ces appellations innombrables recouvrent la même notion, certaines religions parlant même « d’Eternel ».
Tout ce qui est manifesté a une naissance et une fin : les formes ne durent pas. Ce qui échappe à cette loi doit donc être d’une autre nature. C’est dans l’immatériel qu’il faut chercher. L’Esprit, bien que parfaitement réel et vivant, est hors de la matière, et il peut nous guider vers l’Eternité par le chemin initiatique.
En effet, que nous propose l’Initiation ? Une recherche guidée par des symboles et des rituels, qui sont hors du temps. Par les rituels, une voie longue est proposée, permettant l’accomplissement de l’Œuvre, d’un commencement jusqu’à un terme. Ils constituent des cycles complets qui réalisent une globalité. Notamment, les travaux dans le Temple, effectués de la première à la douzième heure, intègrent cette durée à l’éternité. Ce n’est pas une durée sans fin mais une intensité spirituelle constamment présente et recréée par chaque rituel vécu. Une voie brève est ouverte par les symboles, langage formulant l’éternité à travers l’instant présent, moment immuable où la genèse se manifeste. La condition de l’acte juste au moment juste y est incontournable dans un instant délicat et aussi précis qu’est fine la lame d’une épée. Mais cela conduit jusqu’au contact de l’éternité. Tout acte accompli à temps est hors du temps. C’est ce qui se vit lors du travail dans le Temple.
Les physiciens démontrent maintenant que le temps se contracte lorsque la vitesse augmente, pour s’abolir à la vitesse de la lumière, démontrant ainsi, involontairement peut-être, l’éternité de la lumière. La Tradition l’a toujours affirmé. Elle indique également que l’homme sage n’a pas à chercher une vie éternelle improbable pour plus tard. Il possède en lui une parcelle divine qui n’est jamais née. Devenant Lumière lui-même, faisant retour dans le sein de la conscience universelle et retrouvant l’Esprit du Principe de Création, il passe, ici et maintenant, à une vie en éternité, une vie dans le Feu.
Les Grands Mystères permettent le passage de l’existence humaine, limitée, à cette intemporalité. Accomplir ici-bas l’éternité est possible et revient à prolonger l’Œuvre. Ainsi se construit perpétuellement le Temple, dans une forme variable, mais toujours porteuse de l’Esprit.