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I.11.c LE REALISME (exigence ; détermination, ferveur, colère ; rythme, vibrations, changement)

         Avec le Sagittaire, nous savons ce qu’est ce réalisme qui consiste à percevoir le réel intangible, mais il ne suffit pas de le connaître ; il faut le mettre en œuvre par les forces vitales de l’énergie créatrice révélées par le Verseau. Notre voie a une exigence de réalisme qui se met en œuvre avec détermination et qui ne peut s’accomplir que dans un changement pour s’adapter au temps, au lieu et aux hommes.

          Dans notre démarche, la notion de réalisme est très importante. Nous pourrions avoir tendance à y échapper si nous étions trop attirés par des éléments du passé, par un attachement à un passéisme, une admiration sans bornes des civilisations anciennes, emprunte de nostalgie, voire plus gravement de mimétisme. En ce sens, ce serait un danger nous amenant à nous placer hors du temps présent.

          Le réalisme dont est porteur le Verseau n’est pas en rapport avec le terme médiéval « realis », qui a trait aux choses matérielles, mais avec le mot latin « res » dont a dérivé « realis ». Ce « res » signifie chose mais aussi, on l’oublie trop souvent, circonstance, réalité, utilité, cause, raison. Il s’agit donc d’approcher la raison des choses. Le sens est proche du hiéroglyphe « Khet » signifie chose, événement, affaire mais aussi offrande et rite. L’offrande au divin et le rite sont le moyen de lier les mondes entre eux, tout comme le Verseau comme nous l’avons vu au chapitre précédent ; ainsi les différents temps et les différents espaces peuvent communier et le réel peut se révéler.

          On considère généralement que le réalisme est une théorie qui affirme que les objets existent indépendamment de ce qui est pensé. Est réel ce qui existe par soi-même. En fait, il s’agit d’une doctrine philosophique dont le grec Platon est l’un des fondateurs. Elle nous dit que les êtres individuels et les apparences sensibles ne sont que le reflet des Idées qui, elles, sont les véritables réalités. L’idée, le concept, seraient donc plus proches de la réalité que la manifestation qui ne serait qu’une illusion. La matière n’est que la forme achevée de la manifestation. La cause de la manifestation est la réalité cachée du monde. C’est ce qui est précisé dans le rituel d’Initiation.

          En effet, lorsque le néophyte entre dans le temple, il est affublé d’un bandeau qui lui masque la vue. « Qu’avez-vous aperçu en entrant en Loge ? » demande le viatique ; « Rien que l’esprit humain puisse comprendre : un voile épais me couvrait les yeux. Le bandeau symbolise l’illusion et les préjugés me privant du rayonnement de la véritable Connaissance, et m’incite à vivre en esprit les symboles qui me sont proposés ». La Réalité se vit donc en esprit dans une Loge à travers le langage symbolique. Juste avant la levée du bandeau le Vénérable Maître dit : «Mes Frères, apprêtons-nous à vivre l’origine et la fin de toutes choses ». Cet instant est le point charnière qui unit la manifestation et le Principe créateur. Une fois le bandeau relevé le Vénérable Maître dit : « Novice ! Tu vois orientés vers toi les rayons de Lumière. Devant toi se révèle le mythe de création. Tu contemples le secret des Grands Mystères, celui qui conduit, à travers la mort, à la vision du UN qui se manifeste par les Lois causales et les Fonctions créatrices ».

          Le message est clair. Dans le temple, la réalité apparaît en pleine lumière. Le Verseau exprime cette jonction entre l’idéal et la réalité que l’on retrouve dans l’acte rituel du relevé du bandeau, dans un mouvement d’immanence et de transcendance. Le mythe de création mis en acte dans le Temple est la seule représentation possible qu’ait trouvée l’homme de cette réalité universelle éternelle à la source de toutes choses.

         Pour Schwaller de Lubicz, toute la nature n’est que symbole. L’Égypte des pharaons reste dans le réel par son symbolisme et ne se perd pas dans l’esthétisme. Ainsi dans son architecture, il y a d’abord le but (la destination) et tout s’y adapte magiquement tel le Nombre et ses rapports. Les Nombres sont la réalité abstraite qui permet de percevoir la réalité de l’univers. Le réalisme se manifeste entre autres par l’harmonie et l’amour.

 

         Dans cette quête du réalisme, tout part alors de l’exigence, tant individuelle que communautaire. Elle consiste à former la Communauté initiatique et à construire le Temple ici-bas pour qu’il se construise dans l’invisible ; c’est le seul moyen de percevoir l’ultime réalité du Temple, celle où règne le Un et le tout, l’éternel souffle qui est à la fois inspir et expir et qui se suffit à lui-même.

         Exigence vient du latin « exigere » qui signifie pousser dehors, mener à terme, régler, mesurer, juger ; il s’agit bien de mener à terme le Temple, le faire pousser pour qu’il soit conforme à la Règle. Par la ritualisation dans le Temple l’exigence est partout présente ; sans doute serait-elle également présente dans la vie de tous les jours si celle-ci était quelque peu ritualisée.

         Le Verseau pense la diversité en fonction de l’essentiel ; il est porteur de l’intelligence sensible et ne rentre en résonance qu’avec l’esprit des choses et donc, par extension, des rites. Sa capacité de recherche, sa détermination le fait s’adapter à toutes les nécessités. L’exigence du Verseau est celle de la Règle. Il recherche toujours le pourquoi, les causes, le centre des choses d’où émanent tous les rayons tout comme le fait la communauté initiatique dans ses tenues.

 

         Pour accomplir cette exigence il faut de la détermination et de la ferveur. La détermination est un terme ambiguë, ayant deux sens : délimiter avec précision (« determinare » = régler, tracer) et cela relève du Vénérable Maître qui détermine le plan d’œuvre, et le résultat d’une décision, d’un acte volontaire ; cela nécessite intention, résolution, absence d’hésitation, opiniâtreté. Il y faut de la sagesse et de la force. Cest la volonté avec laquelle nous suivons notre chemin, après en avoir défini les valeurs. Cela ne signifie pas que nous refusons de considérer ce qui se fait ailleurs et autrement, mais nous nous recentrons sans cesse sur l’axe que nous avons choisi, afin d’éviter de nous égarer. Notons que la détermination de l’impétrant est testé par Neuf fois dans le rituel d’Initiation avant de donner les serments et d’accomplir les voyages.

         Cependant le déterminisme n’est pas loin de la détermination. Dans le langage hiéroglyphique, deux mots sont proches : « cha » (image ci-dessus) décréter, déterminer, prédestiner et « chaa » commencer, origine.

         Autrement dit, le destin réside dans le commencement et se crée par les actes. Mais comme le déterminisme n’existe que dans le devenir, pas dans le réel immuable, la Loge doit sans cesse se référer à l’origine de l’univers et non aux événements profanes dans ses décisions.

         Cependant, comme le Verseau est plongé dans une recherche de l’idéal et peut se contenter d’en vivre la lettre, la détermination doit s’allier à la ferveur. Ce mot vient de « fervere » qui signifie bouillir, ferveur, ardeur ; il y a là du feu. Sans feu, celui de l’amour créateur et notamment du désir initiatique, rien ne se peut. Mais il doit être contrôlé. Seul l’amour de la Règle peut faire que cette ferveur soit juste.

         Mais le feu destructeur n’est jamais loin et ne doit pas devenir une passion fatale comme la colère. Le feu dans ces deux aspects est de couleur rouge, celle du désert et de Seth, dieu indispensable mais dangereux s’il n’est maîtrisé. La colère est une submersion par ce feu et provoque la rupture de l’équilibre des souffles, du contrôle de soi ; « le vrai guerrier est sans colère » (Tao Te King, 68). Elle se manifeste par une sorte de passion à dominer afin de conserver une certaine conscience et de ne pas tomber dans l’excès, voire dans le dogme. Ce sentiment d’irritation contre ce qui nous contrarie peut être parfois nécessaire, mais demande à être maîtrisé, afin de ne pas tomber dans un aveuglement ni dans un refus de comprendre.

         Cette colère doit servir et être mutée. Ce mot descend du grec « kholê », la bile. Or la bile permet l’émulsion et la dissolution des graisses, de les transformer en nutriments assimilables et en énergie. C’est une forme de transmutation. La colère est un solvant alchimique qui peut mener vers un retour à l’origine, aux Ténèbres, au noir alchimique au cœur duquel se trouve la Lumière. Ces Ténèbres sont porteuses de verdoiement.

 

         Cependant, le réalisme ne peut se vivre que dans le mouvement, le changement. Ce concept vient de la nature même de la dualité créatrice qui provoque des transformations incessantes ; il faut savoir concilier les contraires. C’est tout le symbolisme des métaux qui ne sont pas négatifs ; ils sont tout ce qui est susceptible de passer d’une forme à une autre ; nous ne devons pas les perdre mais les déposer à la porte du temple pour que la tenue les change. Toute chose, même si elle fonctionne bien, doit changer pour rester efficace car adaptée au temps et au lieu ; c’est le cas des rituels. L’initié est sans cesse à la recherche de changement efficace.

         En effet, le phénomène de la création est basé sur la vibration. Dans l’océan d’énergie immobile qu’est l’incréé apparaît une vibration auto-créée que nous nommons Principe de création. Tout part de là et tout y retourne. Tout l’univers n’est qu’énergie et différents degrés de vibrations issues de la source divine, la plus dense étant la pierre. Les coups de maillet du Vénérable Maître ont des répercussions dans l’invisible ; ils donnent la vibration qui permet la création. Les coups de maillet agissent au plus profond de chaque frère. Ils éveillent leur parcelle de lumière et les unissent. Cette vibration se répercute par le Verbe qui est consubstantiel à la Lumière. Cette énergie double est le pouvoir de création qui prend forme dans la loge.

          De même, la batterie d’allégresse met à l’unisson les frères et les énergies cosmiques. A l’ouverture des travaux, elle clôt le rituel qui fait revivre la genèse du monde ; elle ébranle l’invisible et l’oblige à être présent par ces appels répétés pour permettre la création que sera la tenue. Avec le rituel de fermeture des travaux, quand l’œuvre est accomplie, la joie de toute la création éclate par ce symbole et l’invisible peut retourner en paix vers le calme permanent de l’incréé.

          Dans une communauté initiatique chaque frère, formulation d’un Nombre selon son grade, et chaque Fonction ont une fréquence vibratoire qui doit résonner dans la loge, manifestant un état de conscience particulier. Chacun apporte des perceptions qu’il a ressenties au contact de certaines choses, de certains êtres, de certains lieux, perceptions pouvant relever de la fulgurance et qu’il est difficile de comprendre ; quant à les expliquer… Mais elles existent ; il faut les accepter et même les considérer comme des instants de grâce qui mettent en relation directe avec le tout. C’est du même ordre que les mantras de l’hindouisme et du bouddhisme. Ce mot provient du sanskrit et peut se traduit par « instrument de pensée ». Un mantra est une syllabe ou une phrase sacrée dotée d’un fort pouvoir spirituel et répétée en rythme. Son pouvoir provient de sons bénéfiques pour les humains basés sur la vibration de l’air qu’il provoque et sa résonance pour modifier l’environnement.

         Le rythme est alors nécessaire tel un battement cardiaque. C’est sans doute cela que certains alchimistes nomment « la voix Cardiaque ». Le rythme affirme que rien n’est linéaire et se manifeste dans sa diversité par des répétitions qui permettent de maintenir en vie, en éveil. Il évite l’engourdissement, l’endormissement, et apporte une certaine dynamique qui permet le dépassement. La marche de l’initié marque ce rythme, mouvement ordonné, accordé au réel et permet de sentir battre le cœur de l’univers. De même, toute tenue a un rythme vibratoire qui fait vivre des changements d’état, des transformations et des transmutations. Elle est pareille à ce que Hermann Hesse appelait le jeu des perles de verre où le maître du jeu, en plaçant chaque perle à sa juste place, permet à la lumière de voyager dans tous les orients. Le temple est ainsi inondé de lumière et devient cette région de lumière où le soleil se lève entre l’orient et l’occident et que les Égyptiens nommaient « Akhet », ce qui n’est pas sans rappeler « Khet » que nous avons évoqué ci-dessus et qui mène au réel.

          Dès lors, la Communauté initiatique vit dans le réalisme et, avec le signe des Poissons, va pouvoir maîtriser la Tradition et la Lumière divine qui se révèle dans le Temple.


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