Après les sujets précédents du plan de travail, la loge a maintenant une certaine maîtrise des Lois Causales, des Fonctions créatrices, des Nombres et des noms. Elle peut donc assurer la fonction de protection, et d’abord celle du Temple.
Nous ne sommes plus dans une période où être franc-maçon est risqué et où le secret est indispensable. Le Couvreur, armé d’un glaive, n’est pas là pour repousser un intrus et assurer la protection matérielle de l’édifice. La protection n’est donc pas à ce niveau. Mais alors, de quoi s’agit-il ? Ou alors, est-ce le Temple qui protège ceux qui s’y réunissent ? Ici, nous évoquons la corde que l’on retrouve en haut des murs du Temple couvert, partant de chaque côté de la porte d’Occident, mais aussi autour des symboles du Tableau de Loge, ou encore autour du cou d’un être qui vit l’Initiation.
Nous allons voir que la corde est ce qui unit tout en séparant, qu’elle fait circuler l’énergie entre les nœuds, et qu’en fait elle est indispensable à la pratique de la voie initiatique.
La nature de la corde est de relier, d’enceindre, d’entourer, de délimiter un espace à part.
Et tout d’abord, elle unifie le haut et le bas. Symbole d’union et d’unité, elle est capable de relier les choses, notamment par ses extrémités et par les nœuds qui sont inséparables tout autant que les intervalles entre eux. Visible dans le Temple et placée en haut des murs, elle unit le Ciel et la Terre voire le Zénith et le Nadir, encercle par le haut à la fois la voûte étoilée et l’espace sacré, faisant le lien entre les différents orients du Temple et rassemblant toutes les fonctions qui s’y exercent. Pour Platon, elle est la lumière qui enchaîne le Ciel et qui entoure l’univers. Elle joint à la source de la Lumière de l’Orient les deux colonnes qui rendent disponible l’énergie primordiale par les vases qu’elles portent, faisant du Temple un réservoir de magie préservant l’énergie créatrice, ce fil qui nous relie au cosmos, tout en la faisant circuler. Si nous la voyons déployée horizontalement, elle est donc peut-être également verticale, proche de l’échelle de Jacob.
On dit que le Temple est couvert, et pourtant son toit est le Ciel ; la couverture n’est pas très efficace puisque l’on voit à travers, à moins que la couverture soit le Ciel lui-même ! Le Temple ouvre sur le Ciel, lieu des étoiles, de la Grande Mère, de celle qui engendre. La corde est analogue, dans sa fonction, aux vases d’airain contenant l’eau qui permettait de contempler le Ciel. Elle apparaît ainsi comme le ventre céleste, le lieu des naissances, de celle de l’Unique sous ses multiples formes. En tant que matrice de la Grande Mère, elle permet la naissance du mythe ; par ses Douze nœuds, et comme le formulait Plutarque (Trois pour Osiris, Quatre pour Isis et Cinq pour Horus), le Père, la Mère et le Fils sont ici présents et le remembrement de l’Homme cosmique peut s’accomplir. Le Temple est le lieu où demeurent le Père et la Mère qui ont été engendrés par le Ciel (Nout), la Terre (Geb), l’Air lumineux (Shou) et l’Humidité radicale (Tefnout), et où règnent le Fils et la Règle. Il ne relève pas du monde des apparences ; c’est une fenêtre du ciel, la demeure du divin, un lieu où celui-ci peut se manifester et surtout être perceptible ce qui est impossible ailleurs que dans ce centre du monde. Traditionnellement, tout temple, église... est ce centre immuable. Dans un sens, si la corde n’est pas circulaire ni fermée mais limitée autour de la porte d’Occident (rappelons qu’au R.I.T.E. cette porte donne sur la salle du banquet et non sur l’extérieur), elle a la fonction de matrice où l’œuvre comme les œuvrants peuvent s’y développer, et elle est toujours prête à accoucher, préparant la poursuite au dehors de ce qui a débuté en elle.
Cependant, la corde a aussi la fonction de séparer du monde purement humain (l’expression monde profane est ambiguë ; le monde n’est pas profane en soi ; c’est la vision que l’on en a qui peut l’être). Pour le Littré : « La protection est l’action de protéger, de préserver du mal, de mettre à l’abri d’une incommodité, d’un danger ». Un cercle, une clôture, une muraille..., tout ce qui entoure matérialise un espace dont il fait partie et lui donne forme tout en délimitant une frontière ; il y a alors un dedans bien isolé et un dehors. Ce n’est pas nécessairement un rejet mais simplement se protéger d’un danger, comme l’illustre un œuf, un bébé dans le ventre de sa mère ou une cellule. Une matrice de création doit être protégée des énergies perverses. Le Temple est harmonieusement construit alors que le monde extérieur, visible, est désordonné par l’homme. Il est nécessaire de séparer le monde des idées humaines et celui de l’Esprit, celui des symboles, pour éviter que ce désordre touche le Temple et donc la Communauté initiatique. Le monde des symboles doit être rendu imperméable au temps linéaire, à l’espace, aux variations humaines par une barrière protégeant des impuretés extérieures. C’est ainsi que, lors des tenues, chaque frère perçoit clairement la sacralité de l’espace et du temps et il ne peut faire ou dire n’importe quoi.
Néanmoins, on ne peut négliger la protection du Temple dans l’autre sens, à l’image du Couvreur qui surveille ce qui entre comme ce qui sort du Temple. Le monde matériel peut-il supporter l’énergie et le Verbe transmis dans le Temple ? Il est sans doute nécessaire qu’ils passent par le prisme de la Communauté initiatique pour être diffusés efficacement. Le Verbe transmis lors des rituels doit être adapté au monde extérieur. Certes, le secret de travaux a pour vocation à être dévoilé pour ceux qui le souhaitent mais en fonction de leurs capacités, qu’elles concernent leur cerveau ou leur cœur.
Cette protection se retrouve partout. En Égypte ancienne, les temples étaient entourés d’un mur représentant l’énergie primordiale, celle du Noun, formulée par la lettre « n », symbole de l’eau et de toute forme d’énergie. La muraille en brique était en lignes ondulées comme le « n » (ce n’est pas un effet du temps, du tassement des briques) ; l’énergie entoure le temple comme à Dendérah (cf. L’image ci-dessus).
En Bretagne, les chapelles sont entourées par des enclos de pierre ou de verdure. Ils ont la même fonction que le mur égyptien. Dans les églises du moyen-âge, il y avait le jubé, et plus tardivement le chancel. Cela n’est pas non plus sans rappeler, dans les romans du roi Arthur, le domaine du Lac où se trouve le château du Lac et où règne Viviane dans le plus sûr et secret des asiles. Parc et château demeurent invisibles de l’extérieur pour celui qui n’en est pas l’hôte ; c’est le refuge enchanté où est entraîné le bébé Lancelot qui y passe son enfance. En effet, Viviane, voyant l’épouse du roi Ban réclamer son enfant qu’elle avait momentanément posé près du lac, « fait trois pas rapides vers le lac, joint les pieds et s’élance sous les eaux ». N’entre-t-elle pas dans un temple ?
En fait, unir ou séparer, l’essentiel est de rendre cohérent ce qui est entouré. Sans espace bien défini, tout serait confus et dispersé. La corde à nœuds réunit ce qui est épars. Les Douze nœuds ne sont pas sans rappeler les signes du zodiaque qui découpe la sphère céleste en deux hémisphères. Cette influence de l’Astrologie sacrée rend l’univers cohérent, et le Temple est à l’image de l’univers. La corde est un symbole de l’éternité des cycles qui protègent le renouvellement éternel de la vie et montre que tout est lié dans l’univers. Les nœuds jouent un rôle de cohésion en assemblant entre elles des énergies. En hiéroglyphes égyptiens, « tchès » signifie à la fois nœud et vertèbre, colonne vertébrale ; les nœuds permettent de maintenir l’ordre causal. Dans le tracé du Tableau de Loge, on commence toujours par la corde pour encadrer et ordonner les symboles, selon un véritable « ordo ab chaos » qui fait naître l’Harmonie, indispensable pour la sérénité des travaux. Ensuite, il y a un ordre pour tracer les autres symboles mais il n’est pas fixe et correspond au moment, à la perception instantané du Verbe par la loge, l’essentiel étant que tous les symboles soient présents car nous avons besoin de toutes les vingt deux lettres pour œuvrer, y compris la corde. Le danger serait dans l’absence ou l’ignorance de certaines lettres. La corde est dans l’ordre qui sort du chaos ; elle est dans les deux. Elle est l’enveloppe, la coquille de l’œuf qui va permettre la concentration de l’énergie pour obtenir la pleine puissance de l’égrégore. Elle assure la cohérence de l’édifice en unissant tous ses éléments. Dans le rituel de consécration du Temple, l’espace sacré est créé en tendant le cordeau, en déployant le plan et en traçant le chemin ; il est alors possible de suivre le cordeau qui est le don de vie. Quand la corde est en place, bien tendue, l’énergie va pouvoir circuler entre les nœuds.
Cette circulation met en œuvre l’Amour ici-bas, harmonise le Temple et permet l’accomplissement du rituel.
La corde, en faisant circuler l’énergie entre les nœuds et donc dans l’espace délimité, constitue en quelque sorte l’athanor de la Communauté initiatique, le ballon, le vaisseau qui lui permet de voyager en des lieux et des temps qui ne sont accessibles qu’à des êtres en fonction, à ceux qui vivent des choses qui dépassent leur nature humaine ou qui accomplissent en conscience leur nature humaine. Qu’elle soit en haut des murs du Temple ou autour du Tableau de Loge, elle symbolise l’Amour en liant les frères comme les symboles ; résistante et puissante, elle permet à l’énergie des travaux, toujours ritualisés, de circuler pleinement. Les nœuds portent bien leur nom de « lac d’amour » mais pourraient aussi s’appeler lac d’énergie. Douze comme les signes astrologiques, ils sont Douze visions de l’Amour universel créateur de vie. Ce sont des ligatures, des points d’union entre les frères et le divin, des points de force, d’énergie qui orientent et organisent les espaces. En traçant la corde, l’Expert est le ritualiste qui donne vie aux symboles, au langage et donc à la Communauté initiatique ; en traçant chaque lac d’amour, il anime « des pièges à amour qui fixent les puissances de création en même temps qu’ils attirent et retiennent les âmes de ceux qui sont en capacité de fraterniser avec elle en participant à l’œuvre ».
Ainsi s’harmonise le Temple. Cette protection de la corde est magique, c’est à dire qu’elle l’entoure d’une énergie qui le rend inaccessible à la disharmonie et permet d’y accomplir la Magie de la Vie. En hiéroglyphes égyptien magie se dit « heka », et s’écrit (cf. le dessin en tête du plan d’œuvre) avec le « h » qui est une corde repliée avec trois boucles et le « ka », énergie, puissance créatrice, force vitale. De plus « ntry » signifie corde magique et « ntry » signifie divin, sacré, consacré ; c’est la corde qui rend sacré le temple. L’énergie qui circule crée un champ qui isole du monde visible pour donner accès à l’invisible et met en symbiose le Temple avec l’univers dont il devient l’image. Dès lors il n’y a plus guère de différence entre les frères et le monde dans lequel ils évoluent. Ceux qui œuvrent sont placés dans ce monde intermédiaire, paradoxalement stable, celui de l’âme, entre le visible et l’incréé, à mi-chemin entre Ciel et Terre, à mi-temps entre l’instant d’avant la création et l’instant présent, de la première à la douzième heure (de midi à minuit dans beaucoup de loges), dans un lieu de tous les possibles, où tout est et n’est pas encore ; ils sont conduits en conscience vers l’origine. Les puissances de création y sont attirées ainsi que les âmes des frères qui peuvent y être en recherche permanente. Ces puissances sont les fonctions créatrices que la loge incarne par les offices. La protection du Temple et celle des fonctions créatrices sont la même chose. Il faut que ces fonctions soient animées et que le Grand Architecte de l’Univers reconnaisse qu’elles sont assumées en son nom. Cela nous interroge sur la construction du Temple et sa fonction. Il est en fait le développement d’un point dans un volume et un temps non triviaux d’où l’importance de la circulation de tous ses composants et de s’assurer de l’heure qu’il est. C’est bien la corde, catalyseur d’énergie et outil de Connaissance, qui permet de vivre toutes les déformations spatio-temporelles qui se vivent dans ce lieu sacré.
Dès lors, le rituel peut s’accomplir et il est possible de faire évoluer les travaux selon ce rituel et la Règle ; l’égrégore communautaire peut agir, le Verbe peut conférer la réalité à ce qui est accompli. Ce sont les paroles créatrices et inspirantes des Anciens, des Initiés passés à l’Orient Éternel qui peuvent alors se transformer en paroles de Lumière puis en constructions sacrées entre nos mains. Chaque frère peut se reconnaître dans un nœud, la corde symbolisant la Communauté initiatique. Les lacs d’amour symbolisent autant le lien et l’attachement des frères entre eux que leur volonté de faire vivre et évoluer la loge. Cette dynamique vient de l’énergie qui circule et du fait que les nœuds ne sont pas serrés. La chaîne d’union est bien la représentation vivante de la corde ce qui fait vivre l’Homme zodiacal. C’est bien par l’Astrologie sacrée que la loge fait vivre l’Homme dans son universalité. A chaque tenue nous recréons et défaisons cette corde par la chaîne d’union qui reste néanmoins imprimée dans les cœurs après les tenues. Il s’agit d’un véritable chaînage du Temple pour le rendre solide, en relation directe avec celui que l’on retrouve matériellement dans nombre de cathédrales, en haut des murs, qui renforce leur cohésion par des barres métalliques. Les nœuds ne sont pas verrouillés ; ils sont lâches, mobiles, souples et néanmoins en tension pour laisser circuler l’énergie déclenchée par le rituel, mettre en mouvement les frères, les dynamiser, les libérer (notamment de l’ego). Non serrés et points de convergence entre visible et invisible, ils sont à même de laisser passer l’invisible qui est en quelque sorte capturé pour pouvoir y voyager. C’est la même chose quand une corde est rituellement autour du cou d’un être, non pas en signe de pénitence qui n’existe pas dans notre voie, mais qui concrétise une énergie qui devient un nouveau nœud et nourrit la loge. C’est notamment la corde autour du cou du néophyte qui n’est pas encore relié à la loge.
La corde est donc bien le moyen de pratiquer la voie, que cela soit par les Nombres qu’elle porte que par son usage dans notre tradition de bâtisseur ou par le lieu où elle nous mène.
En effet, elle est l’expression des Nombres qui structurent le Temple comme les symboles. La corde doit donc porter tous les Nombres et donc le Douze puisqu’il y a douze Nombres primordiaux. Si l’on considère les nœuds de la corde, ils sont Douze ; ce sont notamment les frères de la Communauté initiatique dont le Nombre est Douze quel que soit le décompte. Si l’on considère la corde comme un outil, corde d’arpentage, il y a alors Douze espaces entre les nœuds et donc 13 nœuds (ce 13 n’est pas un Nombre mais un simple décompte).
Ces espaces ne sont pas faits au hasard ; ils sont symboliquement d’une coudée royale, celle du Maître d’Œuvre ; la corde peut alors fonder le Temple, et la Communauté initiatique peut arpenter l’invisible, y voyager sans risque de se perdre, notamment grâce au Premier Surveillant qui rend les frères capables de tendre le cordeau. Seule une corde tendue peut tracer, et notamment le Temple en harmonie avec le Ciel (cf. le rituel de consécration du Temple, qui précise que la corde est l’étoile du Temple). Le mouvement est possible par l’énergie de l’incréé qui passe par l’Orient que la corde focalise puisqu’elle l’englobe. De plus, elle doit être ouverte pour pouvoir tracer, porter des mesures et voyager dans les Nombres comme l’ont fait de tout temps les bâtisseurs de temples. Cet outil est indispensable pour mettre en action le jeu des rapports et des proportions justes qui évitent le désordre et permettent de s’harmoniser avec l’univers. Si l’on sait le manier, il est possible de découvrir l’intérieur de la Pierre Cubique sans craindre de se perdre dans l’inconnu, dans l’immensité de la connaissance qu’elle contient, comme l’alpiniste encordé est en sécurité. Dans le Tableau de Loge, la corde délimite le carré long argenté ; avec lui, elle peut faire tout tracé et donc toute construction. Cet outil de bâtisseur est un des symboles privilégiés de la Chambre du Trait pour pratiquer le Trait et l’Orient. Tel que nous le représentons sur le Tableau de Loge, il a cinq nœuds au Septentrion, trois à l’Orient et quatre au Midi, joignant donc les colonnes sans y être rattaché et restant ouvert à l’Occident. Cet enchaînement de Nombres est une des clefs du voyage du Compagnon en permettant de tracer une équerre, à la condition évidente d’utiliser ces Nombres par les intervalles (cf. le théorème de Pythagore). La corde est bien une matrice qui conduit à l’œuvre par les symboles, les Nombres et le travail communautaire.
Mais alors, où nous mène-t-elle ? Est-elle ouverte ou refermée ? Fermée, elle est un des symboles de la Veuve en son nom d’Enceinte ; elle ceinture le temple, visible de loin, indiquant qu’il y a là un lieu sacré ; elle est enceinte et accouche de tout ce qui est à l’intérieur (les symboles, les fonctions, les frères...). La corde fermée est un cercle magique, infranchissable de l’extérieur. C’est le « chn » égyptien signifiant anneau et qui, graphiquement, peut se développer en « rn », le cartouche entourant le nom du roi, le protégeant donc. Ce cartouche se dit aussi « chnw » qui signifie enceinte, clôture. C’est la porte du Tableau de Loge qui referme la corde, ou la porte d’Occident dans le Temple. Ce qui n’est pas entouré entièrement n’est pas protégé. La porte d’Occident ferme-t-elle ou laisse-t-elle une ouverture béante ? Si nous entrons dans le Temple couvert par la porte du Septentrion, nous en sortons par cette porte d’Occident. Cependant, cette corde est représentée ouverte. Comme elle est de fait fermée comme nous venons de le dire, elle n’est pas ouverte sur l’extérieur (l’enceinte d’un temple est toujours complète). La pseudo ouverture est à l’Occident. La porte d’Occident ne mène pas au monde profane mais vers le pays de la mort (souvenons-nous que les portails ouest de nos cathédrales portent généralement les scènes du jugement dernier). Soit elle mène à la mort, au royaume des morts comme dans la mythologie égyptienne (mais pas seulement) vers, éventuellement, l’Orient Éternel, soit vers la table du banquet, dans l’espace de transmutation. A tous les moments rituels de passage, l’être se trouve entre les colonnes où se trouvent des vases porteurs de l’énergie principielle, près de cette porte, comme dans un condensateur électrique, lieu d’accumulation d’énergie. Il est comme s’il saisissait les deux brins de la corde, achevant la clôture du Temple. La corde devient la chaîne des révélations, reliant l’ancien et le nouveau. Notamment, le néophyte devient celui qui complète la chaîne des frères pour enrichir la tradition. Cette ouverture fermée fait pensée à l’œuvre alchimique de Philalèthe (1645) : « L’Entrée ouverte au Palais fermé du Roi ». Peut-être la corde se poursuit-elle au-delà de la porte par douze nouvelles heures, celles de la nuit que le Soleil parcourait dans sa barque sous la terre pour renaître régénéré à l’Orient comme une nouvelle Lumière. L’Occident est un lieu de régénération. Dans le Temple, nous sommes dans un œuf, une coquille qu’il faut percer car la Communauté initiatique ne peut rester en permanence à l’intérieur, ayant un devoir de témoignage. La porte d’Occident n’est donc pas Une. Elle est double voire triple, et en fonction de celle que l’on passe, on ne va pas dans le même monde. La Communauté initiatique, après le banquet, devra retourner dans le monde matériel pour concrétiser l’œuvre et témoigner.
La protection de la corde est donc plus que spatiale et temporelle sans jamais être un enfermement ; elle s’avère parfaitement universelle, véritablement pont entre les mondes, tunnel sacré reliant le Ciel et la Terre, l’ombre et la Lumière, ouvrant la vision profane de l’univers à une vision sacrée. Puissions-nous communautairement utiliser l’intuition pour pénétrer dans le Temple, entrer dans la corde à nœuds pour voyager dans l’invisible, y percevoir le Verbe et la Lumière afin ensuite d’en témoigner.