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III.1.c Le rituel fait venir le divin et fait accéder à des réalités inaccessibles aux sens

          Aussi étrange que cela puisse paraître, le rituel n’est pas d’essence humaine

mais d’essence divine. En effet, il naît de l’observation par l’homme, de la nature, de la

manifestation et de la volonté de celui-ci de remonter vers l’origine de cette création, de

remonter vers sa cause. Par la formulation du rituel, l’être humain cherche à reproduire ce

que le créateur a fait. Non pas qu’il se prenne pour lui, mais, pour tenter de se fondre en lui

afin de participer en conscience à son Œuvre. Ce n’est pas pour rien que toutes œuvres

réalisées en son nom et véritablement accomplie ici-bas est appelée Grand Œuvre.

          Si nous partons du principe que l’être humain est formé de trois parties : l’esprit, l’âme

et le corps, on peut faire un parallèle entre cette tripartition de l’être et nos trois grands

Piliers. De ce fait, l’esprit conçoit, l’âme anime et le corps exprime. Voyons comment l’être

vit cette tripartition et, comment et pourquoi, ces trois parties évoluent lors du parcours

initiatique, lors de leur passage par le rituel.

          Esprit, âme et corps sont unis ensemble et nous ne pouvons parler de l’âme sans

nous intéresser à l’esprit et au corps. L’univers est le miroir dans lequel le Principe créateur

se reflète. Il est construit selon la Règle par le Grand Architecte de l’Univers qui en a établi

les plans et les mesures (par les nombres), en utilisant la matrice qu’est la Veuve. C’est ce

qu’on peut appeler le processus de création divin. Pour appréhender le divin, donc l’univers, il

faut tenter de percevoir la pensée du Grand Architecte de l’Univers, sa conscience, toujours

présente, toujours en action dans un cycle de création permanente. En tant qu’êtres

conscients faisant partie de la création, nous pouvons tenter de nous approcher de cette

pensée pour nous aussi passer de l’autre côté du miroir, dans la réalité du divin. Nous

sommes des êtres corporifiés issus du plan divin, animés par notre âme, notre conscience

qui nous permet d’agir pour nous relier à la conscience universelle, l’Esprit divin. Cette

ternarité corps, âme et esprit est un socle pour chacun au sein de la communauté initiatique

afin de vivre le divin par une pratique rituelle qui témoigne de la magie de la conscience.

          Commençons par le corps. Le corps est le support matériel de l’être. Sans lui rien ne

pourrait s’accomplir. Il est porteur de l’âme qui contient la Vie sous son double aspect, la vie

terrestre et la vie céleste. Il est le support qui va permettre à l’âme de vivre la règle et les

rituels. Il anime les fonctions de création mais est dirigé par elles. Il n’est plus qu’au service

des fonctions lorsqu’il s’assure de la parfaite exécution du rituel. Celle-ci est plus importante

que de tenter de comprendre les actes qui sont en fait inexplicables mais efficaces. Le rituel

d’ouverture des travaux en tenue principielle met en place les Frères mais a surtout le but de

faire venir le divin. La réussite dépend du désir de la communauté et de son adéquation totale

à la Règle.

          Mais évitons la confusion entre Dieu et divin. Un conte le précise bien : « Deux rabbins discutent tard le soir de l’existence de Dieu. Ils concluent que Dieu n’existe pas. Le lendemain, l’un se réveille et découvre son ami faisant ses prières rituelles du matin. Que fais-tu ? Tu le vois bien, je fais mes prières rituelles du matin... C’est ce qui m’étonne ; on en a parlé et conclu que Dieu n’existait pas et toi, maintenant, tu fais tes prières. L’autre répond : Qu’est-ce que Dieu vient faire là-dedans ? » (Cité par André Comte-Sponville dans L’esprit de l’athéisme).

          L’ancien égyptien neter, essence divine, précise bien ce qu’est ce divin. « ntrw » signifie poteau sacré ; « ntry » signifie corde magique ; « ntry » (non plus le t écrit avec le ciel mais avec une entrave pour animal) signifie divin, sacré, consacré. Cela renvoie à un être impossible à appréhender dans notre monde quotidien sans le secours d’un rituel qui agit par magie, celle qui capte les énergies (d’où l’entrave). On appréhende le divin par le divin, donc par les fonctions créatrices, les offices de la loge. Un ancien rituel dit : « Pas par ma main, Roi du monde, pas par ma main mais par ta force.»

          La fonction agit, quel que soit l’être qui l’anime ce qui éveille la puissance divine. Il n’y a pas d’action personnelle ; seul le rituel agit par les fonctions de création. Il est une transcription des principes divins qui ont pris la forme de symboles. Le symbole permet d’accéder au concept qui est un lien avec le divin qui est lui-même conceptuel par nature. Le rituel, réglé sur l’ordre céleste, ne fait que laisser la Lumière se répandre sous l’impulsion du Grand Architecte de l’Univers. Elle nous illumine et nous élève vers le sacré. C’est donc à la fois le divin qui vient et nous qui allons vers lui en conscience. Ainsi chacune des phrases prononcées est le Verbe qui s’exprime et constitue un échelon de l’échelle de Jacob permettant de s’élever au-dessus de notre individualité pour se rapprocher du divin. Le rituel est un instant sans dimension temporelle, toujours identique et toujours renouvelé cependant.

          A ce sujet, Saint Bernard (Sermon 75 sur le Cantique des cantiques) précise : « Prenez garde à trois choses qui peuvent se produire et qui d’ordinaire égarent les chercheurs : c’est de chercher en temps inopportun, ou d’une manière inadéquate, ou enfin dans des endroits peu indiqués.» Le temps opportun est la bonne heure, celle des heures rituelles, de la première à la douzième heure ; la manière adéquate est le rituel ; le bon endroit est le Temple couvert par le rituel. Il ajoute : « Ceux qui ignorent, ignorent de nuit et par suite ceux qui cherchent, cherchent de nuit.» En effet, on ne cherche pas dans l’obscurité du monde profane, ni même dans la pénombre du Temple, mais dans la Lumière qui s’est répandue dans le Temple par le rituel. Là, nous ne sommes plus dans le monde matériel mais dans un lieu où règne l’Esprit par la présence divine, dans l’invisible.


          Le rituel s’adresse essentiellement à l’âme et la met en relation avec l’Esprit, ce qui est bien difficile sans rituel. Il rend proche du divin en jouant sur la parcelle dont nous sommes tous porteurs. L’âme se met en mouvement et s’éveille à la conscience. En faisant vivre les rituels, la Communauté fait s’exprimer le Principe au sein du Temple et permet ainsi de relier les Frères entre eux, et de relier chacun en esprit au Principe. La conscience vit et s’exprime au sein de notre centre vital, moteur de notre vie en esprit, le cœur-conscience. C’est donc en ouvrant ce dernier, en l’alimentant et en travaillant par et pour lui que les Frères peuvent s’élever en esprit, donc s’ouvrir au divin qui peut entrer et vivre en lui. Le cœur-conscience est en fait la perception intuitive de la réalité divine qui est difficilement explicable et perceptible. La pratique et la répétition des tenues, telles des mantras, permet de nous imprégner régulièrement et de manière cyclique de ces concepts pour s’inscrire dans le processus du divin. L’âme est imprégnée par les rituels. L’imprégnation a pour racine latine « impraeganere » qui signifie féconder. Sur le plan initiatique, on peut dire qu’il s’agit de féconder la conscience de chacun pour qu’elle puisse se joindre à la conscience universelle. Par exemple, le rituel d’initiation est une imprégnation de l’âme d’un être par les quatre éléments. Les initiés imprégnés par le rituel d’initiation peuvent œuvrer ensemble pour s’imprégner du flux divin qui circule en permanence et pour le vivre selon la Règle dans le Temple. Et c’est bien par l’âme que le Verbe, formulé par la Parole peut entrer en chacun et s’intégrer au cœur-conscience. Il y a une diffusion dans l’ensemble de l’être de cette Parole qui irradie sur tous les plans. Ainsi, des portes s’ouvrent pour le Frère qui peut accéder à de nouveaux plans de perception qui ne sont pas du domaine de l’humain, du monde visible, donc des sens matériels. En revanche, il développe ainsi ses sens immatériels, son intuition, la pensée sans image, qui lui permettent de voyager vers le monde réel, donc dans l’invisible.

          La voix est un instrument magique qui agit sur l’invisible et met en jeu les forces qu’il recèle. D’où l’importance de bien prononcer, d’être « ma-khrou », « juste de voix », mot égyptien qui signifie également triompher. Saint Bernard (Sermon 47) ajoute : « Participez toujours à l’office divin d’un cœur pur et attentif. Vous devez y apporter autant de présence active que de respect. N’approchez pas le Seigneur paresseusement, en somnolant, en bâillant, en ménageant vos voix, en n’articulant que la moitié des mots. Pas de sons morcelés ou traînant, de ces bredouillements nasillards de vieilles femmes. Que vos accents soient virils comme vos sentiments... Ne pensez à rien d’autre qu’au sens des paroles que vous psalmodiez. Il ne suffit pas d’éviter les pensées vaines et futiles.»

          Les rituels sont-ils suffisants pour permettre de voir l’invisible et de maintenir les dieux sur terre ? Oui et Non. Oui, parce que c’est leur fonction. Non, parce que le rituel à lui seul ne suffit pas et qu’il n’est qu’un outil au cœur d’un corpus initiatique que l’on appelle le Rit et qui prend corps et s’anime au sein et seulement au sein des communautés. Et c’est ce Rit constitué d’un mythe de création, mais aussi d’un langage symbolique et surtout d’une Règle qui permet à la communauté des frères ou des sœurs d’accéder à des réalités inaccessibles aux sens des êtres individuels. Le premier moyen pour accéder aux réalités immatérielles est celui du vécu du mythe de création, qui n’est que mystère, et qui guide nos recherches, oriente nos rituels et donne de nombreuses clés de perception des mystères de la création. Le second moyen est celui du langage symbolique qui est réalité vivante et permet d’aller au-delà des apparences, de percevoir l’invisible, mais aussi de transmettre les paroles des dieux qui sont par nature informulables. Ainsi peut-on évoquer des réalités inexprimables. Le symbole déroute le mental, développe l’intuition et amène les communautés initiatiques à se rapprocher de l’invisible. Le troisième moyen est la Règle qui permet au Principe de se manifester mais aussi aux communautés de s’organiser et de se développer en harmonie. A la fois règle de vie et yoga de l’esprit, elle permet aux êtres d’accéder à la simplicité et de sortir de l’intellectualisme pour, au final, aller vers les pensées sans images et ainsi côtoyer les mystères au plus près et surtout sans intermédiaires.

          La perception de ce qui nous entoure quand on pratique le Rit dans le Temple va progressivement nous permettre de percevoir des réalités inaccessibles à nos sens humains car elles sont au-delà de l’humain. Cette sensation se retrouve dans la pratique des arts martiaux. La répétition du geste, de la posture, amènent le pratiquant à une perception qui ne semble plus réelle mais en accord avec l’univers qui l’entoure. C’est le Satori dont parle le bouddhisme Chan. Ce n’est pas une compréhension intellectuelle, mais une compréhension directe qui ne se fait pas par la simple parole ni par des concepts mais par la réception et la perception du monde intemporel qui nous attire. C’est une méditation en mouvement, certainement une méditation communautaire et non personnelle. La répétition du rituel joue peut-être un rôle épigénétique en nous ouvrant à une meilleure perception de ce qui semble inaccessible à nos sens par une modification de ces derniers ou par la création d’une perception supra-sensorielle. Le frère voit ainsi s’ouvrir en lui le chemin de la sagesse menant à l’Amour du Principe. Les rituels ne sont pas des concepts qui s’apprennent comme une leçon. Ils sont des ouvertures. Il faut pouvoir les vivre en soi. Il faut s’ouvrir avec sincérité, ouvrir son cœur-conscience qui est la clé pour percevoir le divin. L’intellect et la raison peuvent être un frein à cette réalité s’ils sont utilisés à la place de l’intuition et non ensuite pour formuler ce qui est conçu dans le cœur.


          L’âme continue son cheminement. Par une suite de régénération, de vivification, de changement d’état qui la mènera, peut-être, au mariage avec l’esprit, l’étincelle divine. Elle est porteuse de la lumière divine dans son double aspect, les deux éternités, celle des cycles et celle de l’instant. L’âme peut alors vivre ce que nous nommons l’égrégore. Cet égrégore est l’esprit de la communauté initiatique. Il nous permet de voyager au-delà de ce qui nous est accessible, bien au-delà de ce que le mental peut comprendre. Ces réalités sont inaccessibles à nos sens physiques trop grossiers, pour s’y accorder ; ils ne nous permettent d’appréhender que le monde visible. La réalité divine ne peut se sentir, se toucher, se voir, etc… Il faut passer par un renversement, passer par les sens immatériels. Saint Bernard, toujours lui, dit : « Tout ce que l’on voit est temporel, seules les choses invisibles sont éternelles.» Le réel, vaste sujet, est selon Platon, ce qui est et ne devient jamais, donc hors du mouvement, dans l’incréé, dans le divin. Faire venir le divin dans notre conscience donne une fenêtre sur ce réel. On peut ainsi dire que le Mystère est le cœur caché de la réalité. Les sens initiatiques ne sont pas les sens physiques. Dans le langage courant, on pourrait les nommer un sixième sens, un troisième œil, une perception extrasensorielle comme peut l’être la pratique de la radiesthésie qui peut permettre de percevoir sur un autre plan au-delà des limites physiques et intellectuelles. La réalité divine n’a pas de limites ; elle est hors du temps et de l’espace. S’ouvrir à la perception de cette réalité demande une ouverture pour nous connecter à la conscience universelle, à la pensée du Grand Architecte de l’Univers et de la Veuve. Le rituel est le pivot qui nous fait passer de l’autre côté du miroir, l’outil magique, clé qui ouvre les portes de la conscience. Étonnamment, la science actuelle dit la même chose. « L’exploration scientifique du monde est sans limite, mais elle est aussi sans espoir d’atteindre une réalité indépendante de l’observateur, de ses méthodes et de son échelle d’observation » (Jean Hamburger). « Tous les scientifiques sont d’accord pour abandonner définitivement le réalisme de la mécanique classique, … la réalité au sens intuitif du terme... Chacun de nous voit un monde qui lui est propre et qui peut être différent de celui que voient les autres mais que nous ne pouvons pas nous en rendre compte » (Hervé Zwirn).

          Le risque d’entrer dans cette réalité, c’est de se perdre et de confondre une chose avec une autre. Seul, on se perd ; il nous faut le regard des Frères. La réalité divine est une matière impalpable. Une communauté initiatique pratique des rituels dûment éprouvés par des initiés passés à l’Orient Éternel et qui s’inscrivent dans la Tradition Universelle. Ils sont des cordes qui nous lient et nous guident sur la voie initiatique. Les grades sont essentiels pour ce voyage. Ces différents paliers d’imprégnation vers le divin sont nécessaires pour accéder à cette réalité. Cette imprégnation par le rituel opère sur chaque Frère une transformation, une mutation s’il le désire sincèrement. A la fois de manière ponctuelle comme dans les rituels de passages de grades ou de manière lente par la pratique des rituels cycliques.

          Cette imprégnation du divin se fait pour les compagnons par l’apprentissage de l’usage de la Parole qui modèle la matière. Pour les apprentis elle se fait par un désir d’intégration à la communauté initiatique et par une obéissance à la Règle qui donne accès à la Connaissance. Apprentis et compagnons, nourris par les rituels, pourront ainsi apprendre à diriger leur volonté pour ne pas gaspiller les richesses de la conscience et rechercher les formes les plus humbles de la Vie. Quant aux maîtres, ils sont les garants de la bonne conduite de l’imprégnation par les rituels au cœur de la Loge ; ils accompagnent les apprentis et les compagnons dans une voie de purification, d’humilité, de dépouillement, de devoir, d’incarnation du divin.

          C’est par le rituel que la Communauté peut voyager dans l’invisible, pour enrichir la conscience de chacun, ce que reconnaît la Veuve lorsque celle-ci circule dans le Temple en fin de Tenue principielle. C’est également au moment des chaînes d’union que les Frères ouvrent puis harmonisent leur cœur-conscience, pendant que l’énergie de la Communauté circule entre les Frères. La chaîne d’union permet la mise en mouvement au sein des frères, de cette énergie, aussi physiquement que dans un circuit électrique ou un condensateur, et, laissant circuler le Verbe, permet l’imprégnation du corps de la Loge facilitant l’approche du divin.

          Lorsque tous les sens sont ouverts, que l’être a appris à voyager hors du temps dans l’invisible, et est connaissant des formes qui peuvent manifester le Verbe, alors il peut vivre dans l’origine. Il aura pour devoir de formuler ce qu’il y aura perçu.


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